Même s'il arrive qu'on entende le contraire, et que certains même se hasardent à le jurer, la France est toujours hors du coup, en Afghanistan. C'est particulièrement vrai dans la gestion des opérations aériennes, effectuée par le CAOC (combined air operations center, le cerveau de la manoeuvre aérienne) d'Al Udeÿ, au Qatar. Ce CAOC est dit "Four eyes" car seul le noyau dur, ou jugé comme tel, y met les pieds en permanence. Ces quatre pays sont les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, le Canada et l'Australie.
Ce club fermé repose sur le fait que ce CAOC était très orienté, à l'origine par les opérations en Irak, auxquelles la France n'a pas participé, et cette exclusion, encore aujourd'hui, du CAOC, est vraisemblablement une façon de nous le faire payer.
Alors même que la France déploie en Afghanistan deux ATT (avions de transport tactique), six chasseurs, deux drones MALE, et onze hélicoptères de manoeuvre, d'attaque et de renseignement. Bref, des ressources aériennes un peu supérieures à celles du Canada (un ATT, quelques Heron loués et moins d'une dizaine d'hélicoptères) et de l'Australie (trois hélicoptères, un ATT). Sans compter le bilan d'activité de la France, discret, mais bien réel, en termes d'effets produits par ces aéronefs, d'heure de vidéo, de renseignement brut -l'ISAF serait très friande des dossiers produits par nos Mirage F1CR...-
Cette situation d'exclusion, déplorée in petto par la France, est bloquée depuis plusieurs mois. La France maintient des ROE restrictives pour justifier le fait qu'elle ne participe pas à la programmation et à la conduite dans le CAOC. Les anglo-saxons pratiquent par exemple couramment le dynamic targetting, ce que les Français s'interdisent de faire trop régulièrement.
Les anglo-saxons motivent leur décision de fermer la porte par le fait que la France met en oeuvre des caveats (1). Et qu'elle n'a pas à avoir une lisibilité totale sur les deux (au moins) autres théâtres couverts par le CAOC d'Al Udeÿ : la corne de l'Afrique, avec deux pays sensibles, Somalie et Yemen, ainsi, qu'évidemment, l'Irak, malgré un retrait programmé.
C'est, aussi, sans compter les opérations réalisées au Pakistan. Pour autant que leur ATO (air tasks orders) transitent par le CAOC...
(1) un terme qui ne recouvre sans doute pas la réalité française. D'ailleurs, les responsables américains, eux-mêmes générateurs de caveats, avaient confié au précédent CEMA que la France posaient très peu de restrictions, sinon aucune.