samedi 13 juin 2009

300 !

Ou le vrai film qui engage 300 rétiaires -armés d'un filet et d'un glaive- (1) autour du Bourget !
300 militaires de l'armée de l'Air sont à pied d'oeuvre depuis mardi et jusqu'à la fin du salon du Bourget pour créer une bulle hermétique au-dessus et aux abords de l'exposition. Ce dispositif particulier de sûreté aérienne (DPSA) est une densification des mesures appliquées en tout temps et heure au-dessus de Paris et d'un certain nombre de zones, en France. C'est le commandement de la défense aérienne et des opérations aériennes (CDAOA) du général Gilles Desclaux qui a la charge de cette mission, qui mobilise, en temps normal, entre 350 et 500 aviateurs, toute l'année.
Stradivarius
Le DPSA du Bourget est multifacettes : il comprend notamment des capteurs, des effecteurs et un "sas", la cellule de coordination de l'activité aérienne (C2A2), que nous avons pu visiter ce jeudi. La C2A2, initiée par le général Jean-Patrick Gaviard, CDAOA, au sommet d'Evian (2003) permet à l'activité aérienne de continuer sans rien perdre en sûreté. Ce n'est possible que par une active chaîne de renseignement, essentiellement humain, dont les modes opératoires et les moyens sont cependant difficiles à populariser sur internet. Le CDAOA dispose de sa propre cellule rens, initié également par Gaviard, en son temps.
Le général Christian Van Duynslager, qui veille au bon fonctionnement du système rappelle qu'en 2007, la C2A2 avait accrédité un vol sur la base de cette chaîne rens particulièrement réactive. Le passager principal était un important acheteur aéronautique, qui avait juste oublié de se signaler, en temps et en heure.
La C2A2 dispose d'un Stradivarius, une recopie de la situation aérienne tactique. Ce qui permet d'informer en temps réel le préfet, dernier reponsable au Bourget. La C2A2 permet aussi de faire remonter l'information "terrestre" du Bourget sur le centre national des opérations aériennes de Lyon Mont-Verdun.
Des caméras thermiques Matis, ainsi que des guets à vue ont été disposés dans la zone, où opère également une batterie Crotale : c'est le coeur de la "bulle" multicouches. Deux hélicoptères Fennec Masa avec tireurs d'élite sont aussi à l'affût, éventuellement en alerte en vol sur des créneaux sensibles. Enfin, trois Mirage 2000 -armés bon de guerre- et six Epsilon complète le DPSA pour les segments hautes vitesse.
Le pilote de Mooney dans la lune
Depuis qu'elle existe, cette chaîne n'a jamais tiré sur un aéronef habité : les "moustachus" évoquent bien des ballons-sondes météo, voire même un chasseur qui avait perdu son pilote et continuait à voler. Mais ce n'est sans doute qu'un histoire de bar de l'escadrille.
Dès 1959, une ordonnance du général de Gaulle autorisait la défense aérienne à prendre toutes les mesures nécessaires, tir compris, contre une menace aérienne, sans considération de taille, ou d'emport. Donc avion civil compris, même si la convention (internationale) de Chicago le prohibait. Le 11 septembre 2001 a un peu changé les choses l'interprétation que les forces aérinnes se font de Chicago. Preuve de la prise de conscience, des droits de suite peuvent désormais être effectués, grâce à des accords transfrontaliers négociés à l'initiative de la France.
Les interceptions sont plus courantes. Un Mooney piloté par un récidiviste allemand avait ainsi été posé par la P.O, à Tours, en juin 2007, pendant le salon. Ce qui avait généré quelques vapeurs aux responsables. D'autant que le pilote tournait ostensiblement la tête quand le pilote du Mirage 2000 lui intimait l'ordre de la suivre, et que le cap filait droit sur Paris. Ce vol s'était vu appliquer des mesures polaires de niveau 6 (le maximum est à 7).
Pas plus tard qu'il y a quinze jours, un autre... Mooney a été intercepté dans le sud-est. Et une semaine plus tard, récidivait.

Nos photos : des "pétafs" de l'EC 2.12 "Picardie" de Cambrai s'activent sur un Mirage 2000 lors d'un décollage sur alerte réelle, en 2003 si mes souvenirs sont bons. Cette P.O était activée à Creil. En bas : deux tireurs d'élite de l'escadron de protection de la BA 107 de Villacoublay prennent la pose "last challenge before shoot", dans leur Fennec. (crédit JMT)

(1) ne cherchez pas de gladiateurs au Bourget, le rétiaire est le symbole héraldique du CDAOA, et il s'agit donc bien d'une allégorie.