Le livre blanc n'en est encore qu'à sa version V2 et plus un jour ne passe sans une fuite sur le futur format de ce qui restera de la défense ensuite.
Avant même que le livre blanc n'ait fixé le décor, et les besoins qui en découlent, certains ont déjà décrété le niveau d'os qui restera sur la bête. Le livre blanc, un pur exercice de style alors ? La dernière réunion doit se tenir la semaine prochaine, avant la remise du document au président. Mais on a toujours su que l'heure de vérité viendra avec la loi de programmation militaire.
. Dernière synthèse, informée, celle de mon collègue Jean Guisnel, qui annonce plusieurs hypothèses, dont une, apocalyptique, qui cumule la suppression de 30 régiments dans l'armée de terre, les pires malheurs pour Nexter, la vente du Charles-de-Gaulle, l'arrêt du Rafale et de l'A400M, 30.000 suppressions de postes à la Défense, 15.000 dans l'industrie (1). C'est concret, cela fait un peu chiffon rouge-ballon d'essai-pour-faire passer la pilule... et pourtant. Il va falloir avaler la pilule de toute façon.
. On sait bien que l'armée française qui voulait être forte dans tous les domaines est morte avec le mur de Berlin. Faute de choix, on a réduit de façon homothétique depuis sans jamais trancher sur la perte d'une capacité, qui, on sait jamais, pourrait toujours servir, il fallait garder la cohérence. La bosse des programmes est arrivée (on l'attendait depuis dix ans), la rigueur aussi, et donc, c'est l'apocalypse demain car la défense n'est pas priorité nationale. Mais le président lui-même l'avait dit, la défense contribuerait aux réductions. Ni plus ni moins. Son ministre l'a encore redit il y a peu. Le 13 juillet, le président avait même auguré des renforcements nécesaires. Suivant en cela le candidat Hollande.
Revenir sur cette promesse, sur ces promesses, achèverait la communauté militaire, déjà séchée par 54000 suppressions de postes, Louvois, les disponibilités chancelantes de matériels, et une disponibilité totale des personnels qui ne s'accepte qu'avec des compensations (2).
. La baisse tendancielle de la courbe n'a été défendue depuis ni par les politiques, ni par l'opinion publique. Cela changera-t-il cette fois-ci, avec l'apocalypse annoncé ? Pas sûr pour la deuxième, mais côté politique, c'est un peu la boîte noire. Pour l'instant, rien de bien violent, par delà la menace de la commission défense du Sénat de ne pas voter la LPM. Mais ce n'est qu'une commission. Et à l'assemblée, la gauche est majoritaire. C'est elle qui tranche. Et au final, le gouvernement peut engager sa responsabilité pour passer en force s'il avait une bronca en face de lui (article 49).
Les semaines à venir seront compliquées. Vraiment.
(1) un comble pour un gouvernement qui voulait relancer l'industrie.
(2) combien de douaniers, d'instituteurs ou d'agents des affaires maritimes accepteraient de délaisser leur mission pour aller trimbaler des rouleaux de paille ou déneiger les routes. Oui combien ?