Sujet resté longtemps tabou dans l'armée, les blessés de guerre deviennent, progressivement, un sujet... comme un autre (1). Plusieurs évènements ont contribué à les rendre plus visibles, mais c'est surtout leur multiplication, en Afghanistan, qui aura, en quelque sorte "forcé la main" des plus réticents à évoquer le sujet. Rien qu'à Uzbeen, une vingtaine de paras ont été blessés (2), alors que dix soldats étaient tués.
Dès 2009, le gouverneur militaire de Paris, le général Bruno Dary fait circuler des troncs, le 14 juillet, pour collecter des fonds destinés aux blessés. Incroyablement inédite, l'initiative reste peu relayée, donc ne déclenche pas vraiment d'électrochoc. On parle pourtant alors de 350 blessés par an, toutes causes confondues.
Les initiatives se poursuivent, avec des concerts sensés là aussi permettre de récolter des dons. Cet été, le ministère a offert un séjour en famille d'une semaine aux blessés, dans les centres IGESA. Le bilan de cette opération n'est pas encore tiré.
Un site internet en création, qui traite de reconversion des militaires, souhaite aussi pouvoir prendre en compte la situation particulière des blessés qui quittent l'institution, et "que les employeurs puissent en prendre conscience".
Un major recruteur, Rémy Sabatié, a même enfourché son vélo, cet été, pour collecter des fonds, et populariser la cause des blessés. C'est même devenu, hier, l'objet d'une manifestation prévue à Paris fin octobre.
Combien sont ces blessés ? Si une certaine pudeur continue à régner sur les blessés qui reviennent, toutes les semaines, d'Afghanistan, les synthèses, toutes causes confondues, posent moins de problème. Ainsi, la cellule d'aide aux blessés de l'armée de terre (CABAT) gère-t-elle (pour la seule période 1991-2009) 4.854 blessés (3), toutes causes confondues, répartis en 800 blessés en mission de courte durée (MCD), 2.160 en Opex (4) et 1.894 en métropole. Rien que pour 2009, 278 militaires ont été blessés, dont 143 en opex.
(1) preuve que c'est possible, la Croix avait sorti un excellent dossier sur le sujet, en juillet, après que pour la deuxième fois en deux ans, Hervé Morin ait accueilli des blessés de guerre et des familles des morts au combat, à la garden party du ministère, le 13 juillet.
(2) leur sauvetage, sous le feu, par leurs camarades et le traitement par les équipes du SSA en aura sauvé sans doute quelques uns d'une mort certaine. Une équation qui se déroule, en fait, à chaque TIC. N'oublions pas, cependant, que le bombardement de Bouaké (2004), à lui seul, aura fait 38 blessés (et 10 morts, dont neuf Français). 17 marsouins du 3e RIMa ont été blessés, et deux tués dans la reprise du pont de Verbanja (1995).
(3) soit une moyenne annuelle de 269 blessés.
(4) soit une moyenne annuelle de 120. 2009 est donc largement au-dessus de la moyenne.