Après le vice-président LREM de la commission de la défense de l'assemblée (Jean-Michel Jacques)
ce blog donne la parole au LR François Cornut-Gentille, rapporteur spécial de la commission des Finances sur le budget de la défense
Quel avis portez-vous sur la gestion du dossier covid-19 par le minarm ?
Je n’ai que les éléments qu’on a pu voir ou lire dans les média. Comme rapporteur spécial de la commission des Finances sur le budget de la défense, au-delà des sujets traditionnels sur les équipements que je suis depuis longtemps, je ferai certainement un zoom sur la gestion du covid-19. C’est en ayant toutes ces pièces qu'on pourra tirer un bilan argumenté et pas une impression. J'ai néanmoins une impression double, et paradoxale. Les armées ont été présentes sur les livraisons de matériel sanitaire, en outremer aussi. Un travail utile, pro, sérieux. Mais une sorte de sur-com sur le sujet dont je me demande si elle sert la défense a eu un effet perturbant. On n'a pas besoin de montrer qu’on fait son travail en permanence. On avait l’impression que l’armée voulait exister à tout prix. Le symbole de ce que je dis, c’est sans doute l’EMR de Mulhouse. L'armée y a fait quelque chose d'intéressant et d'utile car les hôpitaux d'Alsace atteignaient la saturation. On a sur-vendu 30 lits, surtout rapporté à l'ampleur du sujet, et il y a eu ce décalage entre le moment annoncé et celui quand l'EMR a fonctionné. Cela a permis de raviver un débat sur l'armée et la santé.
De même sur le Charles-de-Gaulle, l'enquête de commandement est en cours, il faut être très prudent sur tout ce qu’on dit pour le moment. La difficulté de la défense à communiquer là-dessus semblait indiquer certainement un embarras, peut être des erreurs.
Pensez-vous qu'il y aura un impact budgétaire sur la défense ?
Tout le monde, minarm, industriels, états-majors, attendent, espèrent, un plan de relance, comme celui intervenu après la crise de 2008. Il peut être appréciable, intéressant. On va avoir des interrogations. Déjà avant le covid-19, les armées avaient des limites si l'on se réfère à la dernière audition publique du général Lecointre. Cela doit nous amener à nous poser des questions. On progressait, mais les marches les plus dures à franchir arrivent maintenant, saura-t-on le faire quand PIB aura reculé de 10 % ? C'est une interrogation énorme. Je crains toujours, et pas que dans la défense, que des ajustements soient faits. Il faut effectivement à court terme faire un plan de relance, et il faut très vite engager une vraie réflexion, librement, posant les questions stratégiques. A quoi servent les armées d'aujourd’hui ? Est ce qu’on a les bons instruments ? La crise en Méditerranée est très forte, durable, la situation n'est pas réglée. On a évoqué l’effort nucléaire, considérable, il a un sens, dans le monde dangereux dans lequel on rentre. Mais il faut peut-être refonder le nucléaire. Il faut faire un tour d’horizon assez fort. Gérer le court terme avec un plan de relance et après, réfléchir à la stratégie de défense sur le monde d’aujourd’hui. En général, c’est l’habillage de choix qu’on a déjà faits. Une réflexion relativement longue, sur plusieurs années, peut-être trois, serait nécessaire.
Est ce que notre mode d’intervention, c’est Barkhane, faut-il faire plus en Méditeranée ? Ce sont des questions.
Comment assurez-vous votre pouvoir de contrôle sans pouvoir accéder à votre bureau à l'assemblée?
Actuellement, je ne le fais pas. Les conférences en visio, c’est mieux que rien mais le travail de contrôle parlementaire suppose de vraies auditions et rencontres. Les auditions sont seulement une partie émergée de l'iceberg. L'audition en visio ne vous donne que le discours officiel mais ne permet pas le contrôle parlementaire. Une vraie audition suppose de challenger la personnalité entendue, préparer l'audition en amont. Il ne faut pas que cette situation se prolonge trop longtemps.
Mes infops et photos sur le twitter @defense137.