. Un courant montant dans l'armée demande plus de précautions sur les données de toutes sortes qui sont exportées de la communauté militaire vers l'extérieur. Prenant pour exemple l'affaire Merah, on peut en effet s'inquiéter de certaines restitutions des média, avec un luxe de détails importants autour de bilans de feu personnalisés par exemple. Sur au moins un cas, ce serait pourtant à la demande de son armée qu'un pilote a dû ainsi s'exposer (il faut coloniser les minutes d'antenne et les cm2 de papier, car le livre blanc est en train de s'écrire). Plusieurs documents diffusées par les canaux officiels laissent aussi passer des détails importants.
Pour ma part, les opérationnels que j'ai pu croiser insistent tous sur les précautions de sécurité opérationnelle qu'ils prennent, en plus des consignes professionnelles permanentes qui sont les leurs.
. Depuis l'Afghanistan, il est de tradition (mais aucune loi n'y fait obligation) de ne plus donner que le prénom et le grade d'un militaire interviewé. Néanmoins, les outils disponibles sur étagères permettent, sans trop de difficultés, de retrouver les noms réels des intéressés. Publication au journal officiel, mais aussi publications de com' (revues écrites, facebook, twitters et tutti quanti) du ministère livrent en permanence des milliers de noms, associés souvent à des unités et des visages. C'est le propre des terroristes que d'utiliser tous les moyens de sources ouvertes que l'on peut trouver. Plusieurs affaires de fatwas sur internet ou de menaces téléphoniques mises à jour, ces dernières années, sur des militaires, démontrent si besoin était que les précautions ne sont pas superfétatoires. Rappelons que les identités des personnels de plusieurs unités du ministère (COS notamment) sont protégées par décret, et que globalement, ce procédé a mis un peu d'ordre. Sans empêcher les oublis de floutage. Il n'est pas rare que les personnels des forces conventionnelles eux-mêmes se demandent pourquoi ce floutage n'est pas généralisé pour les personnels en opérations. Sur le propre Facebook de l'EMA, deux internautes (dont j'ai enlevé les noms, mais qui figuraient en clair...) soulevaient hier la question, avec une tentative d'explication d'un troisième :
- Ne serait-il pas judicieux de masquer les visages de tous les personnels photographies? Certains, j'en suis sur, ne seraient pas ravis de se voir sur Facebook.Et après on nous répète de ne rien mettre sur les réseaux sociaux...
. L'Etat-major des armées (EMA) a progressivement diminué le flot, déjà pas épais, d'images, depuis plus d'une semaine, et restreint encore le niveau de détails qu'il livre sur les opérations. D'aucuns y voient une précaution supplémentaire pour ne pas devenir un capteur indirect des djihadistes.
Mais, l'effet produit est évidemment désastreux car alors que le président avait fait, le 11 janvier, une promesse d'information aux Français, via les élus et la presse, il faut le constater, faute d'informations, Serval est déjà retombé dans les limbes médiatiques, remplacé à la une par les affaires de grue, de cheval, et de météo...