Cela peut se concevoir, les activités de renseignement, et particulièrement de ROEM faisaient l'objet, pendant Harmattan, d'une protection particulière (1). Trois capteurs étaient précisément cités : les SNA de la marine, ainsi que les Gabriel et les Mirage F1CR du 2.33 Savoie. Aucun des trois, pas plus que le travail abattu par l'escadron drone 1.33 Belfort, n'étaient mis en valeur, à Mont-de-Marsan, vendredi; qui accueillait pourtant le ministre de la défense.
Pour être passé à l'époque à plusieurs reprises à Solenzara, qui fut le nid de cette guerre discrète, dès la mi-mars, je peux témoigner que la consigne de silence (pas de discrétion, de silence) a été prise au sérieux, sur place, et appliquée. La façon de nier l'évidence -le travail du F1CR et du Gaby- avait manifestement été soigneusement répétée, tout comme la façon de protéger ces zones interdites de presse (2). Une fois de plus, le porte-avions de l'armée de l'air aura été une bonne base de projection, que ce soit pour les capteurs, la puissance et même le fret.
La même protection d'activité a été portée sur l'activité du drone Harfang, qui faisait l'objet d'un puissant embargo médiatique (3), ainsi que, dans une moindre mesure, sur la nacelle Reco-NG du Rafale : cette dernière faisant partie du "pack export" du Rafale, on pouvait la photographier, mais une fois dit qu'elle était merveilleuse -ce qui est vrai-, les conversations tournaient court avec les opérationnels.
Une fois la campagne terminée, une directive de communication de l'EMA a perduré, interdisant d'évoquer la thématique renseignement avec les journalistes : c'est témoigner de l'extrême sensibilité du sujet, en terme de communication opérationnelle, en tout cas.
On a pu constater comment la consigne avec été appliquée dans la marine, au plus haut niveau de la sous-marinade, avec pour résultat, un papier plutôt documenté paru dans le Monde sous la plume de ma camarade Nathalie Guibert (4), qui avait déjà récupéré les chiffres d'activité de l'ALAT, dès l'été.
Après, qu'on ne me dise, plus, et notamment dans la marine, que ce sont les journalistes qui nourrissent les guerres de clochers interarmées.
(1) on se rappellera, par exemple, que les largages de fret dans les djebels, pourtant aussi sensibles, si ce n'est, nettement plus sensibles car ils ne se font pas en standoff, n'ont pas eu droit à une telle protection, puisqu'ils ont fait la une du Figaro.
(2) il était pourtant possible, malgré tout, de croiser des représentants des trois services de renseignement abondés par le budget du ministère de la Défense, dans et autour de la base.
(3) c'est TF1 qui a pu, aux forceps, récupérer des images du drone.
(4) On a compris que comme douze ans plus tôt devant les gorges de Kotor, les SNA se sont relayés pour interdire et renseigner, une évidence, le seul élément manquant au puzzle étant le nombre de SNA mobilisés dans ce chouf submergé.