Arte a offert hier deux documentaires de très bon niveau dans le cadre d'une Thema consacrée à l'Afghanistan. Sans stéréotypes, sans mythos, et sans pathos.
Dans le premier documentaire, 100% teuton, on découvrait un adjudant pérégrinant avec sa patrouille (motorisée dans des Mercedes pas très blindés : quel Français irait patrouiller en P4 ?) dans le RC-N. S'affichant avec des policiers moyennement rassurés, sur le marché du coin. Il y manquait un éclairage sur le travail des provincial reconstruction team (PRT), sur lesquelles les Allemands furent pilotes. Mais pas les bilans, moins supportables. Ces quatre morts et 29 blessés allemands, touchés dans un attentat suicide, en 2003, à Kaboul. Ou ces trois morts allemands, au marché de Kunduz. Et l'afghane, tuée par erreur, négociée quelques milliers de dollars... Et ces vétérans, frappés en 2003 à Kaboul, toujours incapables de reprendre une activité normale.
Et un petit rappel : les Allemands seront bientôt 4.500, largement devant pas mal de contributeurs, dont la France. Difficile, donc, de faire la leçon aux Teutons, sans tout considérer. Oui, ils ont des caveats, mais oui aussi, régulièrement, ils effectuent des opérations, avec interpellations à la clé (encore la semaine dernière). Mais ils sont sans doute moins bons dans le faire savoir, et dans le don de leçons.
Le deuxième documentaire valait aussi le coup. C'était à Aziz Abad, les 21 et 22 août 2008. 60 enfants, et une trentaine d'adultes, femmes et hommes, périssaient alors qu'ils étaient réunis pour un deuil. L'armée américaine, tuyautée par une balance d'un autre village, était montée à l'assaut de nuit, pensant faire le bilan sur des talibans. Dans le village, on a pensé à une attaque des talibans, : bref, on s'est tiré dessus, et le gunship a travaillé, toute la nuit. Chacun pensait faire son devoir, sans doute.
Le documentaire américain remonte la piste des responsabilités. Jusqu'à filmer le procès de la balance, condamnée à être pendu. Peut-être un bouc émissaire pour les caméras de la télé, ou pour les morts d'Aziz Abad. Si c'est le bon, c'est le lucre qui l'aurait motivé : son village gagnait moins d'argent que celui d'Aziz Abad, à la base militaire toute proche...
(1) pour compléter cette séquence : les Allemands ont bâti dans la base de Mazar un mémorial à tous les morts en RC-N (notre photo, crédit JMT). Ils avaient tenu à le montrer à des journalistes français, en 2007, sans doute pour nous convaincre qu'en RC-N, on ne cueille pas des pâquerettes. A l'époque, l'armée allemande avait connu plus de pertes que la France.