Avec un ministre qui tweete et suit les tweets des journalistes (1), il était difficile de rester à l'écart du progrès induit par les réseaux sociaux.
D'autant que le nouveau DICOD l'a lui-même reconnu devant la presse jeudi, les médias sociaux sont devenus incontournables dans le paysage de la défense. Pour diffuser les messages de la Défense, comme pour les journalistes eux-mêmes, à l'image de votre serviteur, qui a créé ce blog en avril 2009. De son côté, l'EMA a aussi mis en place un compte Facebook afin de s'affranchir des rigidités du site internet de la Défense. L'EMA peut ainsi mieux bénéficier de soutiens directs de la part des familles de militaires, mais pas toujours ceux attendus.
Globalement, cette communication numérique suscite des questions, des doutes, et quelques remous en interne. Car la progression de cette numérisation de la com s'est faite dans un ordre anarchique (2) : à l'instar de ce que font les médias entre eux, les armées sont engagées dans une course à l'échalote sur le net, et défendent bec et ongles cet espace, qui sera sans doute bientôt le seul, après la disparition annoncée des magazines papier (3). Face aux récriminations d'une partie de la presse, les armées estiment aussi normal et légitime de diffuser des photos que leurs propres photographes ont prises, comme l'a affirmé le chef du Sirpa Terre, le colonel Bruno Laffite.
Le problème serait presque simple, si la course à l'échalote n'était pas alimentée aussi par des forums gérés par des civils, qui diffusent les photos, destinées initialement par l'EMA à la presse. Un état de fait qui horripile l'EMA et l'ECPAD (car les crédits sont très régulièrement omis), les agences de presse (qui voient ainsi une activité leur échapper) et, il ne faut pas le nier, la presse spécialisée, régulièrement la dernière servie. Alors qu'elle est par ailleurs reconnue, elle aussi essentielle, surtout quand les temps se compliquent.
Le débat a fait irruption en point presse, un confrère d'Europe 1 (qu'on ne peut donc par targuer de corporatisme puisqu'on parle d'image et pas de son), également en responsabilité à l'AJD, constatant que les diffusions anarchiques de photos posaient de nombreux problèmes, à commencer pour leurs auteurs dont les noms n'étaient souvent pas cités.
C'était prévu de toute façon, la communication de la Défense va devoir intégrer cette problématique numérique, alors que les baisses d'effectifs s'annoncent dans la filière com', qui moblise un millier de postes budgétaires. Il faudra faire mieux avec moins de personnels, sans doute mieux choisis, et mieux équipés : comme le reconnaissait un livre-brûlot récemment publié par une ancienne communicante de l'armée de terre, là aussi, des progrès sont à faire.
(1) les tweeters des journalistes constituent l'essentiel des 130 abonnements du compte officiel du ministre.
(2) à ce sujet, lire l'éditorial de Pierre Bayle dans le dernier armées d'aujourd'hui, et les explications du colonel Burkhard, conscom de l'EMA, dans le même support. Les deux convergent, statistiques à l'appui -mais la quantité n'est qu'une partie du problème- pour affirmer que tous les moyens possibles ont été donnés à la presse au Mali, dans le respect de la sécurité des opérations, donc des personnels.
(3) d'autant que malgré les décisions prises par le passé, l'armée a connu une nouvelle vague de publications internes. Une décision prise dans la décennie précédente prévoyait que seules les publications des organes centraux de communication seraient autorisées, soit cinq supports seulement pour tout le ministère. Parmi les motifs évoqués à l'époque pour cette réduction de voilure figuraient la réduction des coûts et éviter le risque de conflits d'intérêts (un terme qui revient à la mode actuellement), car ces publications étaient financées en partie par la publicité collectée chez des fournisseurs.