Le gouvernement soumettait en fin d'après-midi au vote des députés la poursuite de l'opération Serval. Le ministre
de la défense est le premier entré dans l'hémicycle, à 16h53, et s'inquiète presque de s'y retrouver seul. Les députés entrent ensuite, au compte-gouttes. La droite est la première à arriver, députés de base et poids lourds mêlés. François Fillon, Jean-Louis Borloo sont suivis par Philippe Vitel, Patrick Ollier, Henri Guaino, Eric Ciotti, Christian Jacob, Lionel Lucca, Philippe Meunier, Philippe Folliot, Christophe Guilloteau -de retour d'Afrique de l'ouest, avant d'y retourner. Le diplo du ministre, et le général Noguier en civil, directeur de son cabinet militaire, se placent au deuxième rang.
Le président de l'assemblée, Claude Bartelonne prend place sur la tribune.
Jean-Marc Ayrault commence son discours, en faisant lever les députés pour honorer la mémoire des cinq soldats qui sont morts au Mali, après avoir souligné le "courage exceptionnel" et le "professionnalisme de nos soldats". La plupart des orateurs y feront aussi référence, citant comme lui les noms des morts.
Le communiste Jean-Jacques Candelier rappelle que les forces africaines n'ont pas les moyens de rester seules au Mali, et demande que soit faite "la lumière sur le rôle du Qatar" sur l'avant 11-janvier. Il dit aussi que son groupe n'accordera "pas un blanc-seing au gouvernement (...)" et termine sur une formule-choc : "L'opération Serval ne doit pas devenir une opération Licorne bis".
Le SRC Bruno Le Roux enchaîne, en rendant à nouveau hommage aux cinq morts français de Serval. Et conclut sur un proverbe bambara : "on n'est pas orphelin d'avoir perdu père et mère, mais aussi d'avoir perdu l'espoir..."
L'UMP Pierre Lellouche explique que son groupe votera la poursuite de l'engagement, même si ce dernier suscite des interrogations graves. La permanence de deux théâtres simultanés a "posé des problèmes aux hélicoptères et aux véhicules blindés". Le constat est aussi amer sur l'Europe de la défense dont il discerne le "constat de décès". (...) "La France est seule au Mali" alors qu'elle est pourtant au service de la sécurité de l'Europe, sur place. "Je m'étonne qu'il n'y ait pas d'opération Eufor Mali alors que l'UE dispose de groupes multinationaux. Il faudrait que le gouvernement interroge ses partenaires sur ce vide... Que nos partenaires acceptent de partager au moins" le fardeau du coût de l'opération au Mali, demande-t-il.
"Ce que nous avons fait au Mali est de procéder à une opération de nettoyage mais à qui allons nous laisser les clés ?" interroge-t-il aussi, en rappelant que le Mali émarge au 175e rang mondial (sur 187) dans le classement des richesses. Les contributeurs à la MISMA sont dans les mêmes parages.
L'UDI et ancien ministre de la défense Hervé Morin déplore que la France n'ait "pas fait du Mali une priorité diplomatique", en rappelant, comme le précédent, l'absence au sol d'autres partenaires occidentaux, notamment européens, autour de la France. "Les forces africaines de la MISMA ne sont pas prêtes à prendre le relais, assure-t-il, si tant est qu'elles le soient un jour".
Lui aussi est déçu par l'UE. "A quoi bon continuer à fabriquer des forces européennes (...) pour in fine ne jamais s'en servir, il faudra un jour poser cette question aux Européens. (...) Non, clairement, il n'y a personne à qui passer la main" lâche l'ancien ministre.
Dans sa réponse aux interpellations et aux doutes des députés, le ministre de la défense livre quelques informations. Serval compte désormais 3850 militaires au Mali, contre les 4500 que l'opération mobilisait au plus fort de l'opération dans l'Adrar. Les 1.000 personnels qui subsisteront pourront bénéficier du soutien de trois bases avancées à proximité immédiate : N'Djamena, Niamey, Ouagadougou. Pour montrer la césure avec la période des combats, le ministre parle de "Serval adapté".
Le vote est sans surprise : 352 votants, suffrages exprimés, 342, pour, 342.