Nommé seulement ce midi en conseil des ministres à la tête de la DICOD, Gérard Gachet ne devrait pas présenter, sauf changement de dernière minute, le point presse hebdomadaire de demain, et c'est son désormais adjoint, le général Philippe Pontiès, qui devrait encore officier, comme il le fait depuis la fin du printemps.
L'impétrant a déjà dirigé la communication d'un ministère, à l'Intérieur, mais avec des ressources bien moindres : même si on met bout à bout les effectifs de communication de la police et de la gendarmerie (1), on arrivait alors difficilement à dépasser les 120, soit dix fois moins de ce qu'on peut trouver à la Défense.
L'Intérieur, sujet de moqueries récurrentes de la part des communicants défense, parce que ce sont les syndicats de police qui y effectuaient, alors, intégralement le service pour les média, a bien changé, alors, sous l'ère Gachet, recruté par MAM, qui vomissait les syndicats. L'ancien journaliste du Figaro et de Valeurs Actuelles y avait lancé une lettre d'informations, des talbeaux de bord, modernisé les publications internes, et réformé le service central (la DICOM, pendant de la DICOD), alors que la police recrutait à tour de bras des communicants pour son service central (baptisé SICOP) et en implantait en région, sur le modèle de la gendarmerie. Les effets sont visibles, et les cadres de la police, plus régulièrement visibles dans la lucarne, résultats des petites graines alors semées. Lui-même avait d'ailleurs colonisé les écrans de télé, sans se risquer à rentrer dans la routine d'un point presse hebdomadaire, tendance qui touche depuis plusieurs années celui de la Défense.
Mais la Défense tient bon et à son point presse, car les questions des journalistes, y compris les plus farfelues, débouchent irrémédiablement sur de vrai papiers, comme les posts de ce blog l'illustrent... tous les jours. Et c'est une façon de défendre le format de la DICOD (160 personnes avant d'arriver au Balardgone), l'organisation de la semaine (pré-réunion le mardi à la DICOD à l'école militaire, calage le jeudi au ministère, à 10 heures...) et la flotte de véhicules (dont une berline avec chauffeur), malgré les 10 minutes de trajet à pied.
Quel pourra alors le mandat de celui qui avait été vite pressenti, mais que le ministère a préféré garder en réserve, alors que d'autres castings de journalistes étaient aussi effectués (sans succès d'ailleurs) ?
D'abord gérer la crise, avec un enveloppe budgétaire 2012 contrainte. La DICOD ne gère certes pas toute la filière, mais impulse, coordonne... et commande de très nombreux sondages, tous fort coûteux, et tous pas très utiles. Son prédécesseur, Laurent Teisseire (2) avait d'ailleurs dû recadrer des instituts un peu trop aventureux dans leurs questions aux sondés et donné une deuxième impulsion à la numérisation de la communication, en noyautant les réseaux sociaux.
Qu'il faudra encore bien plus investir, comme nous le révélions 11 décembre. Le plus beau coup de Teisseire est d'avoir imposé Parlons Déf, un site Facebook branché pour capturer les jeunes, cible n°1 des efforts de la filière (bien devant les... journalistes).
La grande défaite, mais qui se partagent tous les membres de la même filière, est de ne pas avoir réussi à enrayer la baisse d'intérêt tendancielle des journalistes, hors d'Harmattan et des opérations coup de poing au Sahel et en RCI. On aura tout essayé : en envoyer à l'IHEDN, subventionner avec des milliers d'euros l'association des journalistes de défense (AJD) et même héberger une boîte aux lettres à la DICOD...
Les journalistes viennent d'ailleurs plus facilement écouter la communication opérationnelle. Et même s'ils en rigolaient encore la semaine dernière, les confrères viennent avidemment chercher les éléments d'explications sur les morts français en Afghanistan, sur une placette située au bout du ministère, le nom du porte-parole de l'EMA est connu, mais pas celui du ministère.
Pour se faire un nom à la Défense, Gérard Gachet a plusieurs solutions. Créer le buzz, en choisissant par exemple de faire des phrases sans sigles, ce qui le rendrait vite populaire chez les journalistes de passage. Ou, écoutant les bruits de coursive évoquant un énième audit, en prenant les devants, en sortant sa serpe, et en en devançant les conclusions évidentes : trop de monde, trop de publications, trop de doublons.
(1) dont les effectifs totaux avoisinent peu ou prou ceux des trois armées et de la DGA.
(2) aujourd'hui dircab du ministre.