Boxeur de grande classe, véritable gueule d'acteur malheureusement jamais utilisée, négociateur sur le tard, et même maintenant, écrivain (1), Robert Paturel est une légende au RAID, service qui fête, demain, ses 25 ans. Une légende qui a quitté il y a trois ans les panthères noires de Bièvres, après avoir contribué, dans son dernier poste, à former les nouveaux arrivants au RAID (crédit : DR)
Comment as tu été amené à rejoindre le RAID ?
Je m'occupais des sports de combat et faisais déjà partie de la brigade anti-commando (BAC), l'ancêtre du RAID créée à la préfecture de police, et puis j'en avais assez d'enseigner des méthodes comme le menottage que je ne pratiquais pas sur le terrain : mon premier "client", je l'ai menotté au RAID. C'était donc logique que je rejoigne cette unité qui comptait déjà beaucoup de mes amis.
Quels sont tes souvenirs les plus forts ?
La prise d'otages à l'école maternelle de Neuilly, pour la durée et l'angoisse, puis la fois où je me suis retrouvé devant un fusil à négocier pendant une heure en plein soleil, à Amiens en 1992, en face d'un jeune déséquilibré qui venait de tuer un autre collégien. Et enfin le jour ou j'ai désarmé à mains nues un forcené qui retenait une femme dans un appartement du Plessis-Robinson. L'homme était un grand costaud et il détenait deux armes blanches, un feuillet de boucher et un ciseau à bois. Des situations, il y en a eu bien d'autres et mes copains auraient aussi pas mal de choses à raconter.
Que laisse-t-on quand on quitte le service ?
Beaucoup de choses et j'ai le sentiment de toujours faire partie de ce service auquel je suis très attaché, j'ajouterai que mes autres collègues retraités éprouvent la même chose. Quand le service va mal, je le ressens encore maintenant, et pourtant ça va faire trois ans que je suis parti, j'ai l'impression d'être en congés mais pas en retraite.
Devrait-on mieux employer les "anciens" qui ont quitté ?
Là on fait un peu référence à mon roman dans lequel je fais rappeler des anciens pour une crise majeure, je pense que ce serait impossible en réalité, hélàs. Je ne sais pas, les jeunes ont leur carte à jouer, ce serait mal venu de toujours vivre avec le passé et les nouveaux ont besoin de faire leurs preuves, mais c'est vrai qu'on a encore des choses à dire et je ne suis pas avare de mes conseils quand on me les demande. Mais je me méfie de l'expérience et j'évite "d'étiqueter" les situations", ça permet d'éviter les surprises : "l'expérience est une lanterne accrochée dans le dos qui n'éclaire que le chemin déjà parcouru". Je continue d'ailleurs pas mal de formations à l'extérieur pour les Polices municipales et au sein de l'académie des arts de combat (2).
Comment comprendre que la deuxième génération de RAIDmen comprend aussi des enfants de la première génération ?
Il faut comprendre que le RAID était une famille, les enfants des raidmens se retrouvaient régulièrement au service pour des fêtes (arbre de Noël, fête du RAID, matchs de foot, de rugby, etc.....) et puis les enfants qui admirent leurs pères ont envie de leurs ressembler et de suivre les mêmes traces. Ce qui nous permet à nous les vieux de les admirer à notre tour et aussi de les envier d'être encore "dans le coup".
(1) Les Panthères Noires de Bièvres, Editions Baudelaire, 2010.
(2) www.adacfrance.com