Fidèle à une longue tradition de pédagogie, voici une réaction du général Jean-Patrick Gaviard (1), ancien sous-chef opérations de l'EMA (2001-2003) et ancien commandant de la défense aérienne et des opérations aériennes (CDAOA), sur les opérations en cours en Libye. Un éclairage et des précisions utiles de la part de ce praticien de la guerre aérienne, alors que les opérations aériennes ont commencé il y a trois mois, et s'interarmisent progressivement :
"Contrairement à certaines affirmations, les opérations aériennes "d'opportunité" sont des opérations certainement les plus planifées !
En effet, avant d'envoyer des hélicoptères en mission au-dessus d'un théâtre d'opérations où la menace sol-air existe et où, compte tenu de l'autonomie réduite de ces machines, les zones d'objectifs potentiels doivent être identifiées par avance, par un drone par exemple, il faut préparer en détails la mission et donc la planifier.
Par ailleurs, la perte d'un hélicoptère nécessite comme pour les opérations effectuées avec des avions de combat de disposer de capacités de récupération des équipages (mission de CSAR ou PRCC) qui elles aussi nécessitent une préparation très affinée et donc planifiée.
Par ailleurs, le distinguo entre des opérations planifées réservées aux avions de combat et des opérations "d'opportunité" confiées aux hélicoptères est très caricatural. Comme chacun a pu l'observer depuis de nombreuses années et en particulier en Afghanistan les Rafale de l'armée de l'air et de l'aéronautique
navale, ainsi que les M2000D et les drones armés, effectuent aussi des missions d'attaque au sol en temps réel (dénommées "Time sensitive Target" ou TST).
Ces missions sont planifées pour des raisons d'efficacité et de sécurité. Les appareils attendent au sol ou en vol la désignation d'un objectif fourni par des forces au sol ou par le centre de commandement à partir d'informations fournies par un UAS ou drone.
Enfin, aujourd'hui les opérations quelles soient aériennes ou non quelles soient en temps réel ou non nécessitent d'être combinées et donc d'être planifées pour atteindre l'effet final recherché par le commandement interamées.Dans ce cadre, l'apport des hélicoptères constitue une capacitaire supplémentaire
indéniable, qui combinée à d'autres capacités (avions de combat, drones..) permet de varier les modes d'actions via une planification interarmées intelligente."
Général (2s) Jean-Patrick Gaviard.
ancien sous chef opérations des armées (2001/2003)
PS : à ces rappels sémantiques, j'ajouterai que les premières frappes ont bien été effectuées dans le cadre du TST. Huit bombes, quatre GBU-12 et autant d'AASM, sont venues immobiliser une colonne de chars à 10 km au sud de Benghazi, le 19 mars. C'était, un peu avant l'heure dite, le début des opérations en Libye.
(1) Le général Gaviard intervenait hier lors du colloque sur 20 ans d'opérations aériennes, organisé par le CESA, et introduit par le VAE Bernard Rogel, actuel sous-chef ops de l'EMA.