Comme le 19 mars avec les Rafale, les images de l'attaque des hélicoptères français en Libye tournent déjà en boucle sur France 24, et devraient être reprises par les télévisions du monde entier. L'illustration de la capacité de la France à entrer en premier (1) ainsi que de l'excellence de son matériel et de ses équipages : parmi les hélicoptères qui ont frappé cette nuit, il y avait au moins un Tigre, sinon les deux que comporte le groupe aéromobile embarqué à bord du BPC Tonnerre.
C'est l'OTAN qui l'aurait annoncé le premier cette nuit (vers deux heurs du matin), grillant la politesse à la France (2). Selon l'EMA, 20 cibles ont été traitées ce samedi matin, très tôt, dont une quinzaine de véhicules. La Grande-Bretagne a fait de même dans sa zone, avec des hélicoptères qui avaient quitté le HMS Ocean. L'attaque était "coordonnée".
L'action nocturne s'imposait dès le départ. L'ALAT y est à l'aise, et les tireurs AAA kadhafistes n'y voient rien, ce qui réduit fortement ses possibilités d'action. Reste, bien sûr, les missiles sol-air très courte portée (SATCP), mais un dispositif multicouches était de sortie cette nuit, pour pouvoir, éventuellement, décourager les tireurs de s'exprimer.
La nuit, moins d'appareils volent, ce qui simplifie aussi la déconfliction.
Bref, la nuit s'imposait pour ce "Brega express" qui n'a pas connu, semble-t-il, de difficultés particulières malgré quelques "tirs isolés".
Notons que c'est la première fois qu'une mission d'attaque décolle d'un BPC (3) pour aller frapper à terre. La dernière fois qu'un tel raid avait eu lieu, c'était en 1995, pour l'opération Balbuzard Noir, largement décrite dans RAIDS n°300. Mais le double d'appareils était alors disponible, et l'objet était un peu différent (une récupération d'otages avec neutralisation des défenses).
L'ALAT a opéré, depuis une base terrestre, lors des récentes opérations en Côte d'Ivoire, mais dans un contexte tactique totalement différent, et notamment, une DCA nettement moins équipée.
Incidemment, l'engagement de l'ALAT signe l'entrée en scène, sur des effectifs importants, de l'armée de terre. Même si les experts du 11e RAMa avaient pu concourrir à former d'autres spécialistes d'un autre 11e à l'appui-feu naval.
Pour l'ALAT, l'enjeu est énorme : il ne s'agit rien de moins que de défendre la possibilité d'action dans une guerre jusqu'alors essentiellement aérienne, avec quelques épisodes de combat maritime très concentrés dans le temps et l'espace. Une capacité d'action aéromobile qui doit s'inscrire dans la durée, mais qui, comme pour les moyens aériens, aura du mal à se régénérer au-delà de la fin juillet.
Le risque est aussi plus important : d'abord le risque de dommages collatréraux en zone urbaine. Et plus encore, le risque pour les équipages eux-mêmes. Comme pour le rappeler, des équipages de l'ALAT "drillaient" des scénarions d'extraction immédiate (IMEX), il y a quelques semaines, avant leur départ, intervenu depuis, pour l'Afghanistan. La donne, pour la Libye, n'est pas différente.
(1) En fait plusieurs hélicoptères alliés ont même déjà atterri en Libye (certains y sont même restés avec leur équipage plus longtemps que prévu). Une mission américaine avait notamment posé en Libye pour récupérer une membre d'équipage de F-15. Il n'est pas non plus exclu que des hélicoptères français aient posé la roue sur le sol libyen, et pas qu'une fois.
(2) c'est néanmoins logique, la France étant dans une coalition dirigée par l'OTAN.
(3) le Mistral avait, dès 2006 (avant sa MSO) participé à une évacuation de ressortissants au Liban, avec des Caracal de l'armée de l'air à bord. La dernière mission d'attaque conduite devant la mer devant être, sauf erreur, celle pour récupérer la rançon et les ravisseurs du Ponant, en avril 2007. C'est alors la Jeanne d'Arc qui avait été utilisée, avec une noria composite d'hélicoptères : Panther, Alouette III, Gazelle.