Les aveux des experts du SGDSN à quelques médias choisis, cette semaine, provoquent l'effet sans
doute contraire à celui recherché (rassurer). Ils confirment bien qu'il aura fallu attendre la détection de survols de centrales pour que l'organe chargé de veiller à la résilience de l'Etat (donc d'anticiper plutôt que subir) se mette au travail, alors que dès 2003, les services chargés de la protection du G8 s'inquiétaient du risque généré par l'usage de drones par des terroristes. Les armées et quelques services avaient alors planché sur le sujet en amorce de phase, plutôt que de subir des attaques de drones altermondialistes ou terroristes (1).
Seulement les drones de 2003, de vagues modèles réduits, n'ont plus rien à voir avec ceux de 2015. Et les vecteurs se vendent par dizaines de milliers, aux performances sans cesse améliorées.
C'est bien le "trou dans la raquette" (les médias ont raffolé de la formule du SGDSN), intellectuel celui-là, qui ressort de ces affaires de drones : il est inquiétant, car il démontre bien le manque d'anticipation.
Même si on peut constater que depuis octobre, les choses sont allés plutôt vite : survols fin octobre, lancement d'une consultation de l'ANR en décembre, rendu de copie en février, essais en mars puis en juin (pour autant que cela débouche réellement sur des équipements utilisables). Tout ne va toujours aussi vite dans le monde de la Défense. Mais le camouflet peut parfois être un moteur efficace.
Les solutions présentées aux médias montrent leurs limites (ce qui ne veut pas dire que les plus intelligentes ne soient gardées sous le boisseau), et, en quelque sorte, presque la route à suivre pour des gens mal intentionnés, avant même d'aller chercher jusqu'aux terroristes.
Autre problème, dans la liste figure des mesures cinétiques sur des engins dont le réel caractère dangereux n'est pas prouvé (les drones n'ont effectué aucune attaque pour l'instant). Légalement, on ouvre la boîte de pandore, si les débris de l'engin détruit par le canon à eau atterrissent sur une voiture (voire un piéton). M.Tartempion, au volant, pile, vient cogner l'obélisque, et la collision tue les membres de sa famille. Qui va-t-il poursuivre : le propriétaire de l'obélisque, le fabricant du canon à eau, l'Etat, le malheureux opérateur qui aura pris le risque de faire quelque chose ?
Brouiller le signal GPS ? Bien, a-t-on une liste précise des applications qui utilisent le GPS, et des conséquences en cas de perte de signal ? Dans quelle zone brouille-t-on ? Et en quoi cela empêche-t-il certains drones de voler quand même (s'il est contrôlé à vue cela ne change rien) ?
En l'espèce, plus efficace que la com, c'est bien la capture d'auteurs qui servira l'action dissuasive des autorités. Sur ce point, le bilan reste maigre : une équipe de télé et un pilote de drone qui avait mis en ligne ses images sur Facebook. Bref, sans doute très loin de ceux qui narguent les autorités depuis octobre.
(1) L'EPIGN avait même planché sur des attaques de parapentistes, c'est dire qu'à l'époque, on ne négligeait rien...