dimanche 6 février 2022

Le CEMA en RCI, pour le post-Barkhane

Tous les déplacements et rencontres du CEMA ne font pas forcément l'objet de tweets (en tout cas, pas

préalables). Mais c'est la presse... locale qui a annoncé, la première, l'arrivée du général Thierry Burkhard en Côte d'Ivoire, sans doute hier. L'EMA n'avait pas communiqué sur ce déplacement, et c'est d'ailleurs rare qu'il le fasse. La période n'est pas forcément propice à de grands développements. Un MRTT a ramené des légionnaires du 2e REP en Corse il y a quelques heures, il a probablement aussi amené le CEMA à l'aller.

Pas vraiment besoin de comprendre qu'il s'agit de préparer l'après-Barkhane tout en considérant la nécessité d'endiguement du terrorisme dans la sous-région.

Pour l'instant, le point d'entrée ouest du continent (comme son pendant à l'est, Djibouti, avec les FFDJ) offre à la fois des capacités natives qui peuvent grossir en seulement quelques heures, et une capacité de primo-réaction aux crises, avec le 43e BIMa et un Fennec de l'armée de l'air et de l'espace. Régulièrement, le 43e BIMa concourt à Barkhane, pour les convois, mais pas seulement. Engagé avec les forces partenaires locales, il a aussi interagi avec le 8e RPIMa lorsque ce dernier a sauté d'un A400M parti de Toulouse, dans le nord de la RCI. Une démonstration de capacités comme le nouveau CEMA entend manifestement les multiplier, un peu partout dans le monde.

Le 2e REP armait le 43e BIMa, comme par hasard au moment le plus nécessaire. On n'imagine pas les repmen s'entraîner juste à la course à pied dans le camp. En outre, la RCI offre de bonnes capacités d'entraînement interarmées et interallié. Le 16e BCP débarque pour succéder aux légionnaires. A lui, donc, de possibles escortes de convois, ou des renforcements de Barkhane au Mali ou ailleurs.

Le 43e BIMa dispose surtout d'une zone de transit utilisée déjà pour Serval, et qui va servir pour démonter rapidement Barkhane.

Enfin, et grâce à l'acharnement de quelques pionniers, à Jacqueville et au quai d'Orsay, l'académie internationale de lutte contre le terrorisme (AILCT) est en train de montrer toute la pertinence de son concept. Le CEMA a pu voir l'extrême minutie apportée par un trinôme des forces spéciales terre, du GIGN et du RAID, pour pouvoir perfectionner les opérateurs qui passent sur place. Une zone refuge des GAT, un village sahélien ont été reconstitués, mais le site dispose aussi d'un stand de tir avec la possibilité de réaliser aussi des tirs en véhicule et en hélicoptère.

Le site est particulièrement marqué par l'esprit des autres installations des FST, dans le grand sud-ouest, et ailleurs. Mais aussi par celles du GIGN et du RAID. Ce trio d'opérateurs a incroyablement fonctionné, et cela rappelle, à ceux qui pourraient en douter encore, que : 1/ les trois composantes sont légitimes sur la lutte anti-terroriste 2/ que les trois unités peuvent parfaitement travailler ensemble dans un cadre clair et équitable 3/ le potentiel de croissance de l'AILCT est énorme, et que quelques queues de budget, mais aussi éventuellement quelques renforts RH suffiraient à accélérer encore son cadencement. 

Cette installation peut en outre profiter aux forces françaises, conventionnelles comme moins conventionnelles dans la région. Totalement isolé, le site permet... toutes sortes de situations et en discrétion.

C'est un des leviers de la transformation de Barkhane, avec le partenariat de combat. L'autre est fourni par les éléments français au Sénégal, dirigés par... un autre ancien des FST, le général Michel Delpit. Des observateurs chevronnés s'accordent pour reconnaître que l'ancien chef du corps du 1er RPIMa, comme son prédécesseur (lui aussi issu de la même veine), a fourni les clés d'une meilleure lutte antiterroriste dans toute la sous-région. L'effort est actuellement fourni dans plusieurs pays en proie à des poussées terroristes. Les EFS disposent d'un élément percutant et légitime sur les actions spéciales.

Mais l'AILCT, ce ne sont pas que des commandos qui bondissent, rampent et défouraillent. C'est une académie, avec aussi ses cols blancs, ses juges, chercheurs, policiers, gendarmes. Un vrai outil de rayonnement de la France, et de partage des bonnes pratiques entre Africains.

L'idée avait germé dans la tête d'un membre de l'état-major du COS au lendemain d'une attaque dans une capitale africaine. Son chef (le GCOS) avait trouvé l'idée excellente. Et le chef du chef (JYLD) avait sorti les chéquiers.

Après plusieurs ratés au Mali (les dernières années de Barkhane, des acquis sur le body count et les têtes de série, mais défaite dans les CIM, et plusieurs évolutions négatives du paradigme de Takuba), quelques graines permettent donc de se dire qu'il reste des Africains pour trouver que la France est utile et que tout n'est pas perdu. Et pour vouloir lutter contre le terrorisme.

Que la bêtise des comptes twitter de "panafricanistes", réels ou robotisés, et des manifestants de Bamako ne pénalisent pas l'action de la France en Afrique. L'AILCT et les EFS sont un levier qui peut rétablir la situation. Avec du travail dans les CIM, même si l'EMA dit avoir pris le taureau par les bonnes cornes.

Mes infops et photos sur le twitter @defense137.

Les actus défense de la campagne électorale sur @dansdefense

Les actus de l'association des journalistes de défense sur @ajdpresse