Le CEMAT a laissé percer plusieurs sujets de mécontentement dans son audition par les députés,
notant par exemple que les primes promises par lui-même ou le ministre n'avaient toujours pas été versées aux militaires de Sentinelle : "Il est exact qu’aujourd’hui, à part les deux jours d’ITAOPC, aucun militaire n’a bénéficié des primes annoncées soit par moi-même, soit par le ministre. On diffère le versement de ces primes, mais au bout d’un an, d’un an et demi, nous risquons de devoir faire face à un problème de crédibilité. Et je n’évoque pas le retrait à la source sur un logiciel non stabilisé. Cela inquiète beaucoup nos soldats…"
Il a aussi constaté que la disponibilité de ses hélicoptères restait basse, trop basse. 140 hélicoptères devraient chaque jour prendre l'air, et ils ne sont que 100 à le faire. Et encore, compte-t-on, peut-être, dans ce volume, les hélicoptères de Dax qui eux ne sont pas propriété de l'Etat...
Sur ce problème persistant, le CEMAT évite de citer les responsabilités, et en appelle aux députés, s'ils ont des idées (1) sur le sujet.
Il a aussi révélé que seulement 40% des besoins qui ont découlé des décisions en conseil restreint de défense du 6 avril ont été budgétés, un argument qui risque de devenir très vite un argument politique, à l'heure où la droite estime que le gouvernement n'en fait pas assez.
Le général Bosser livre aussi aux députés ce qu'il disait à la presse jeudi : avec trois percuteurs (qu'il faut changer tous les 3-4000 cartouches apparemment) changés sur un Famas, ou six chargeurs, on se paie un HK416. On peut se demander, dans ce contexte, pourquoi le programme AIF a été lancé aussi tard, on se serait, par ailleurs, évité des explosions de culasse et quelques blessures sur ceux qui maniaient ces FAMAS.
Au passage, le général éborgne les sceptiques du choix d'une arme étrangère : "On ne peut pas dire que l’on est en guerre, qu’on a des besoins urgents, et ne pas acquérir le matériel nécessaire à conduire cette guerre, même s’il n’est pas français".
Le CEMAT a finalement eux gain de cause sur ce "fusil des temps modernes" qu'il voulait. Dans une précédente audition, il avait dit qu'il comptait bien avoir une part de la décision sur ce programme. Désormais, il réclame plus qu'un jeton de présence dans les futurs programmes à lancer.
Le patron de l'armée de terre dit aussi vouloir mieux soutenir l'industrie d'armement dans ses soutex : la création du GTIA Terre aux EAU n'aurait d'ailleurs pas d'autre finalité (pour ceux qui ne l'avaient pas encore compris). "D’ailleurs, l’enjeu aux Émirats arabes unis, avec la mise en place d’un GTIA à dominante blindée, est d’ouvrir en quelque sorte une vitrine technologique avec nos Leclerc, nos VBCI, nos CAESAR, des éléments du génie, etc" assure-t-il.
Comme il l'a aussi dit jeudi, mais cette fois en citant des chiffres, le CEMAT explique que pour le Griffon en tout cas, l'industrie a la capacité de passer le turbo, des 29 véhicules annuels actuels (un peu plus de deux par mois, pas très rationnel...) à 50.
Evidemment, en donnant une telle cadence, on peut aussi s'attendre à une ristourne, mais le CEMAT n'en parle pas dans son audition.
Il s'est aussi félicité des premiers résultats obtenus par le SMV, mais a tenu à prévenir qu'il devait garder son caractère artisanal, car toute "industrialisation" ferait perdre en qualité, et surtout, plomberait encore les effectifs de cadres (un pour quatre jeunes). "Aujourd’hui, pour vous donner un ordre de grandeur, pour 1 000 garçons et filles au SMV, il y a 250 cadres, soit un pour quatre. C’est le volume de cadres d’un régiment. Si vous voulez 10 000 ou 100 000 garçons et filles, faites le calcul. À 100 000, vous atteignez l’armée de terre au complet. Donc, ce n’est plus une armée de terre qui fait la guerre, c’est une armée de terre qui ne fait plus que de la cohésion sociale. C’est un choix politique. Je sais faire. À partir de là, quelle armée veut-on ? Où met-on le curseur ?"
(1) Le député Gwendal Rouillard, rencontré il y a une semaine à Lomé (Togo) a proposé que les procahines UED soient précisément consacrées à ce domaine du MCO. On ne peut qu'abonder dans ce sens.