Fini de rire ou de verser des larmes de crocodile. Les témoignages d'usage d'armes chimiques se font
à nouveau entendre, en Syrie, et tant Emmanuel Macron que Donald Trump ont clairement laissé entendre, peut-être pour des motifs différents, que c'était la ligne rouge à ne pas franchir.
Devant ce(s) nouveau(s) fait(s) accompli(s) qui restent donc à certifier, quels suites ?
1) la première problématique, pour l'Elysée, c'est bien de certifier avant de dégainer l'artillerie lourde promise. Pour cela, il faut avoir des spécialistes sur place (pour collecter des témoignages, des échantillons de produits, etc) et en base arrière, en France, pour certifier le produit. On le sait, les premiers sont plutôt issus de forces spécialisées (DGSE, COS), tandis que les seconds sont plutôt au service de santé des armées, mais aussi à la DRM et à la DGA. Hier encore, l'Elysée était gêné aux entournures pour entrer, avec trop de granularité dans ces détails pudiques, qui sont pourtant en sources ouvertes. Et qui ont d'ailleurs déjà oeuvré lors de précédentes attaques (qui elles aussi avaient été précédées d'avertissement sur le franchissement de "lignes rouges") .
2) une fois les produits incriminés identifiés, mais aussi que leur provenance est garantie, tout comme le mode de dispersion (de grands malades peuvent encore disperser des armes chimiques pour incriminer Damas), Paris et Washington n'auraient donc théoriquement pas le choix, sauf à ne plus être trop crédibles dans les relations internationales. Ni le Français ni l'Américain n'ont, à cet égard à porter l'héritage de non-respect de la parole donnée sur la ligne rouge par leurs prédécesseurs : ils viennent d'être élus, et c'est le premier cas qui se présente à eux. Malgré le risque évident de ré-escalade en Syrie, le nouveau président français, fort d'une popularité internationale et d'une vue inflexible sur la ligne rouge tiendra parole de ne pas laisser impunie une frappe chimique de Damas, et encore moins plusieurs. C'est une certitude.
3) Que possède la France dans sa boîte à outils pour frapper Damas, sans pour autant y perdre la moitié de ses missiles de croisière, descendus à coups de S-300 et S-400, et pire, les chasseurs qui les tirent ? Dans ce domaine, l'Elysée reconnaît déjà "ne pas avoir la maîtrise du ciel syrien", un motif préalable qui empêcherait, de fait, les largages humanitaires sur la Goutha orientale.On peut d'ailleurs l'observer, les Rafale qui décollent désormais de Jordanie peuvent porter quatre missiles (guidés et radar et infrarouge), ce qui n'était pas le cas auparavant. Cela aurait été bien plus compliqué pour les Mirage 2000D, qui n'ont pas de telles capacités d'emport, ni un radar air-air.
Les missions de frappes (contre Daech) ou de reconnaissance qui ont eu lieu en Syrie ont aussi, régulièrement, connu des moments parfois tendus quand les Rafale étaient éclairés radar du sol ou en l'air. Des moments compliqués également en matière de sécurité des vols figurent dans les cahiers de marches et dans les cerveaux de ceux qui les ont vécu.
Bref, même des frappes limitées contre Damas posent de sérieux problèmes techniques. Diplomatiques aussi, puisque les avions peuvent décoller de deux bases (Jordanie, EAU) pour faire les choses simplement et que par politesse, dans ces cas-là, on demande l'autorisation aux pays-hôtes.
La solution de facilité, c'est alors de le faire depuis le territoire national. Comme c'est déjà le cas pour les missions au-dessus de la Libye.
Autre façon de procéder, et qui, politiquement, peut sembler regorger de moins de problèmes, faire travailler une FREMM et son réservoir à MdCN, une arme qui cherche encore sa consécration opérationnelle. A priori, aucune frégate n'est pour l'instant déployée au bon endroit, mais la Languedoc, en préparation opérationnelle, est en mesure de s'y prêter. Certes, au prix que coûte la munition, et au faible nombre commandé, presque une arme de dissuasion conventionnelle. Bref, presque l'arme de la situation, pour autant qu'elle arrive à l'endroit désiré.
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