J'ai produit dès ce weekend un premier papier sur la situation, ijnédite, de fracture entre la DRH-MD et
le CSFM sur la question de la NPRM. Il s'avère que la situation est plus grave encore que décrite dans le précédent post.Face aux données transmises à sens unique sur ce sujet par le minarm, le CSFM a, sur chaque point, eu des propos très durs et inédits. Et des "avis défavrorables," souvent avec observations (ADO). Des reproches adressés aussi bien sur le fond, manifestement décorrélé des réalités, que de la méthode, qui semble nier le caractère incontournable de la concertation, et ramène le CSFM à une sorte de parlement croupion. La personnalité du DRH-MD (pourtant ancien officier de l'armée de terre) revient dans de nombreux témoignages. Il a été conseiller social de deux ministres, après avoir été notamment et brièvement posté à la DICOD.
Son manque de relation avec le CSFM contraste avec un activisme sur twitter, créant, de fait, une situation assez étrange de communication potentielle avec toute la planète, beaucoup moins avec le CSFM et pas du tout avec les APNM.
De quoi savonner la planche pour le (la) prochain(e) de la défense, qui va vite devoir déminer ce très douloureux sujet à peine entré en fonction. Car les termes employés par le CSFM montre un divorce entre le cabinet (incarné par la DRH-MD dont il relève) et la représentation.
Peut-on parler de camouflet envoyé à Emmanuel Macron comme l'a signalé Bastien Lachaud, souvent très inspiré dans les sujets sociétaux du minarm ? Pas sûr, car ce n'est pas Emmanuel Macron qui évidemment s'est chargé du chantier de la NPRM (incontournable). Par contre des promotions issues des cinq dernières années, n'ont pas fait que du bien au minarm. Et clairement, certains cadres intermédiaires tentent (manifestement pas avec succès) des postures qu'ils croient sans doute discerner dans la personne du président et chef des armées.
Exemple du divorce patent, dès le premier point concerné aux primes de parcours professionnels des militaires (attention, le charabia peut apparaître comme du chinois à bien des cerveaux, parfois le mien compris). "Le CSFM estime que "décorréler le plafond des balises d'un échelon de référence, entraînera inévitablement des pertes de rémunération à terme, comme observé par le passé pour les sous-officiers. En outre, la notion de contingentement dans le cadre de la prime de parcours professionnels des militaires (3PM) contrevient au principe d'équité qui veut que les diplômes qualifiants soient rémunérés dès leur obtention. Enfin, la mise à l'écart des militaires du rang de ce dispositif est incompréhensible, alors que leur technicité croissante et leur implication ne sont plus à prouver. Cela d'autant plus que l'écrasement des grilles indiciaires n'est pas suffisamment incitatif à une progression en grades et compétences." Bim !
Le CSFM émet aussi un ADO pour le projet d'arrêté pris pour l'application du décret relatif à la prime de parcours professionnels aux sous-officiers de la BSPP. Il constate aussi que des officiers sont "exclus du projet" d'accès au niveau 2. Il liste "notamment" les officiers de gendarmerie, les OCTA, les commissaires, les IETA. Le CSFM demande aussi "que cette prime intermédiaire soit portée à 22%, valeur médiane entre le niveaux 1 et 3, afin de renforcer l'attractivité et dynamiser les parcours professionnels les plus techniques". Le CSFM demande aussi un accès au niveau 2 par VAE. Un autre clou enfoncé : "le dernier volet de la NPRM offrait une réelle occasion de valoriser les parcours des militaires du rang au travers de la 3PM. Le Conseil déplore que cette opportunité n'ait pas été saisie".
Le CSFM émet aussi un ADO sur un projet d'arrêté fixant le nombre maximal de primes de parcours professionnels des sous-officiers de la BSPP. Ce qu'il a déjà fait plus haut, le CSFM "est particulièrement attaché au principe 'un diplôme+une prime'". En République et méritocratie, on peut en effet trouver cela pas forcément old school.
ADO aussi sur le projet d'arrêt concernant la prime de parcours professionels des militaires de la gendarmerie. Le CSFM demande que "la 3PM soit appliquée sans exception aux militaires de la gendarmerie".
Levée de boucliers des conseillers aussi sur la prime de compétences spécifiques des militaires : "la forfaitisation systématiques des montants (de primes , NDLR) versés s'est avérée être, sur le temps long, à la fois porteuse, d'inefficacité, de stagnation et d'injustice. Cela, combiné à des pertes clairement identifiées sur certaines primes et à la mise en place de règles de non-cumul contraires à l'esprit de la réforme, ne permet pas de considérer la création de cette prime comme une avancée pour la communauté militaire".
Plus bas, le CSFM observe que la "direction du projet NPRM confirme l'existence de perdants parmi les bénéficiaires de l'indemnité de sujétion aéronavale, de l'indemnité spéciale de sécurité aérienne et de l'indemnité pour services aériennes des militaires parachutistes. Que des études doivent être conduites chez les futurs bénéficiaires de la compétence spécifique de plongeur militaire, sur le cumul des primes de compétences spécifiques de combattant terrestre et de combattant parachutiste."
Si l'on considère que ces catégories sont en plus régulièrement en première ligne (et pas avec la comptabilité nationale...) et exposés à des risques associés, multiples et réguliers, on peut s'étonner de cette politique d'économies de bouts de chandelles.
A côté, le CSFM rappelle que "l'indemnité pour services aériens du personnel navigant des sous-officiers n'ayant pas été revalorisée depuis la fin des années 1980". On apprend aussi que le 25e RGA est exclu du dispositif de PCSMIL combattant terrestre. Sans qu'on comprennent vraiment pourquoi.
On l'a compris, la NPRM risque de devenir un sigle tristement célèbre, comme Louvois l'était pour ses nombreuses dérives. Sans faire appel aux douves de ma mémoire, je me rappelle l'étendue des dégâts, notamment en termes financiers pour les familles des militaires, mais aussi de décrédibilisation de l'échelon cabinet (qui avait décidé), de la DRHMD et du SGA (qui avaient appliqué), et évidemment de l'EMA (notamment le MGA de l'époque). On peut remonter le Mékong de Louvois, en relisant ces quelque 70 posts consacrés aux dérives de ce navire fou sans capitaine, interrompu par Jean-Yves Le Drian, après une visite au 93e RAM et au 7e BCA.
Fâcher tous les militaires d'un coup : un risque difficile à prendre, par les temps qui courent. Pourtant, à ce stade, l'application de la NPRM n'est même pas suspendue. On peut donc s'attendre à des réactions vives, y compris dans le champ politique.
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