Dans le flot des informations chiffrées et d'informations tout court qui accompagnent souvent le
processus de vote du budget de la défense, j'en retiens aujourd'hui deux, de la séance qu'a connue hier la commission de la défense. La députée (LREM) Sereine Mauborgne a pris les commandes du rapport forces terrestres (qu'elle co-travaillait jusqu'alors avec Thomas Gassilloud, ex LREM chez Agir Ensemble désormais). Elle est la première femme à écrire sur ce sujet, et on peut même noter que c'est aussi une administratrice de l'assemblée qui l'a accompagnée dans ce travail. La rapporteuse s'est félicitée du respect des promesses de la LPM, elle n'a pas caché non plus quelques points d'inquiétude. C'est le cas notamment sur le nombre d'heures de vol par équipage dans l'aviation de l'armée de terre, qui reste à un niveau préoccupant. C'est seulement 142 heures pour les pilotes conventionnels, au lieu de 200, et 146 pour les forces spéciales, au lieu de 220. Pour les navigants du 4e RHFS, une solide proportion est réalisée de nuit, qui offre le couvert, donc l'effet de surprise. Pas un sport de masse. Et si on n'imagine pas un champion de formule 1 s'entraîner et rouler en grand prix 146 heures par an, on voit mal pourquoi cela devrait l'être pour un pilote des forces spéciales. La simulation, c'est bien pratique, mais cela ne fait pas tout.Néanmoins, on le sait, cette aviation bute sur de très nombreuses réalités qui rendront difficile une évolution rapide : à commencer par une réduction structurelle du nombre de vecteurs. Elle avait envoyé 120 hélicoptères dans le Golfe en 1990, 120 c'est aujourd'hui presque la totalité de la 4e BAC (dont les machines ne sont pas toutes en état de voler...). Il est faux de dire qu'elle est très mobilisée : le nombre d'hélicoptères en opérations reste soutenu, mais sans excès par rapport à des périodes récentes (2011 par exemple avec le cummul Côte d'Ivoire, Libye, Afghanistan).
Par contre, il est vrai que cette aviation est laminée par des auto-relèves répétées depuis des années. Le potentiel est usé plus vite qu'il est régénéré, et les contextes d'emploi abrasent les cellules beaucoup plus vite qu'en centre-Europe. Il est vrai aussi que les hélicoptères de nouvelle génération ont des coûts (et des temps) de MCO exorbitants, et la députée elle-même l'avait rappelée il y a quelques mois, comme je l'avais signalé à l'époque. Au résultat, les équipages volent insuffisamment, mais comme d'autres équipages au sol. La différence, les hélicoptères volent de nuit, dans les pires conditions, dans les airs, et transportent parfois aussi des personnels extérieurs à bord.
La sécurité des vols repose donc sur des normes, les niveaux d'heures de vol ont été définis par l'OTAN, et reconnus par la France. Et depuis des années, ils ne sont pas respectés. La députée explique que les résultats sont bien meilleurs dans l'armée de l'air et la marine que dans l'armée de terre. La conclusion facile est de dire : normal, on y trouve moins d'hélicoptères. Mais si les centaines de millions d'euros injectés dans le tonneau des Danaïdes (le MCO aéro représente la moitié du MCO de l'armée de terre) n'y arrivent pas, il faudra sans doute se résoudre à s'interroger sur le format soutenable. Peut-être la première question à poser, en fait.
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