jeudi 24 février 2022

A la DGA, tout est sous contrôle (ou presque)

C'est toujours assez incroyable de voire jusqu'où l'outrance peut aller. Dans le contrôle, il n'y a

désormais plus de limites à la DGA, une institution ancienne, peu connue pour son sens de la communication. Elle dispose pourtant d'autant d'effectifs dans ce domaine que la marine nationale (et bien plus que la cellule communication de l'état-major des armées, qui dit manquer de personnel). Pour un effectif global pourtant quatre fois moindre. Et la DGA ne mène pourtant aucune opération militaire. Et d'ailleurs, pas beaucoup d'opérations de com non plus, comme nombre de services pourtant bien dotés en effectifs de com (DRM, SGA, et bien des services dont vous n'avez jamais entendu parler...)

Certes, elle mène des opérations d'armement, sur laquelle elle a pris l'habitude de communiquer entre une semaine et quatre semaines après la notification ferme d'un contrat (après le délai de recours au tribunal administratif). Bref, pas de réactivité, et pas d'ouverture non plus, en tout cas, pas à la presse. La DGA n'est plus un sujet d'article dans la presse : le mode de relation à la presse restant néanmoins un bon sujet de blague entre collègues.

Pour aller dans un établissement de la DGA, il faut profiter d'un point presse délocalisé d'Hervé Grandjean, lui-même ancien de la DGA, mais sans doute le moins marqué de son administration d'origine.

Plusieurs fois interpellé sur ces bugs méthodologiques de son service de presse (notamment par votre serviteur), Joël Barre a reconnu des dysfonctionements, même une sous exposition, et fait avancer quelque peu les choses. Je l'en remercie. Mais l'administration reprend vite ses droits à la DGA, et ses bien mauvaises habitudes.

Une des plus anciennes, le contrôle. Sans même savoir pourquoi elle le fait, la DGA contrôle tout, y compris des choses qu'on ne lui demande pas de contrôler. J'ai un souvenir d'une enquête qu'un des siens avait déclenché sur un confrère soupçonné d'avoir vendu à la postérité des perfos d'un matériel. Manque de bol, les données évoquées dans un papier figuraient... sur un panneau en sources ouvertes. Bref le diable se niche vraiment dans les détails, et parfois, il faut bien les connaître avant de crier au loup.

Tout le monde est conscient de la complexité d'un SNLE ou d'un M51, chacun sait ce que la défense de la France doit à la DGA (et j'en suis familialement conscient).

Par contre, cela n'autorise pas à produire désormais des conventions d'un rare ubuesque, consistant en sept pages d'arguties juridiques qui n'ont rien à voir avec l'exercice normal d'un journaliste en France, en 2022. Mais qui font appel à des réflexes pavloviens d'un officier de sécurité formé en Corée du Nord, ou peut-être en Russie, le pays de saison. Tout cela pour voir (peut-être) voler un... engin cible.

Pas le reportage du siècle, donc.

C'est d'ailleurs en 30 ans la première fois qu'un tel document m'est soumis dans un reportage au sein de la DGA.

Après avoir raté la médiatisation de son année anniversaire, la voila qui rate la suivante. La com c'est un métier. Pas une activité d'officier de sécurité (fort utile par ailleurs).

Je reste évidemment disponible pour les media souhaitant connaître ces bien étranges manières de la DGA en matière de communication. Pour le reste, on peut imaginer qu'il y aura une réaction en chaîne à ce post : évidemment, je conserve le document, et je reste évidemment prêt à en fournir le contenu aux media qui le demanderont puisqu'il n'est pas couvert par le secret. La minarm elle-même, qui m'a donné des garanties de son ouverture d'esprit envers les media lors d'une réunion, à l'été 2020, doit également rappeler à ces excessifs les basiques d'une communication gouvernementale.

Que face aux associations professionnelles de journalistes, le président lui-même a rappelé lors de ses voeux à la presse, le mois dernier : les media sont tout simplement essentiels à la démocratie. Et particulièrement en temps de guerre : à décourager les derniers média qui s'intéressent à lui, le minarm risque de ne plus avoir grand monde en face de lui.

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