dimanche 14 février 2021

Avant N'Djamena : combien ça coute ?

Au final, peu des Français sont passionnés par la gabégie que produit notre système administratif, mais le fonctionnement de la défense a toujours attiré plus de curiosité naturelle. Sans doute parce qu'au final, au coeur du régalien, cette défense se doit, plus que les autres ministères, d'être exemplaire dans l'emploi des euros confiés par les contribuables.
A la guerre, le budget doit régler des frais supplémentaires : l'abondement de solde lié à l'emploi en zone opérationnelle, le welfare des soldats, le transport stratégique effectué par des avions loués, le renseignement réalisé par des acteurs privés, mais aussi les pertes en matériel, les pertes en hommes (inestimable pour leur famille, leurs proches), les blessures (pour certaines à vie, dans le corps et/ou l'esprit), les crash programs pour renforcer une énième fois des VBL dont on connaît pertinemment les défauts de cuirasse, etc.
Dans cette liste qui n'est pas, à desseins, complète pour ne pas t'étourdir, lecteur ou lectrice du dimanche matin, on l'a bien compris, une partie seulement est couverte par ce qu'on appelle couramment les surcoût opex. Ce qui rend ce chiffre pas totalement illustratif de l'impact budgétaire réel de Barkhane.
Le chiffre, fondé ou pas de 900 millions ou d'un milliard sera donc de toute façon toujours en dessous.
Notamment parce qu'il ne prend pas en compte de multiples réalités. L'environnement opérationnel n'est pas celui des camps de Champagne, le matériel y vieillit donc beaucoup plus vite. Or certains ne verront pas leur remplacement dans l'ordre budgétaire accéléré pour autant.
Le remplaçant arrivera à l'heure prévue il y a des années, au lancement du programme. Et sans doute en retard même (le décalage de programmes est un sport prisé du gestionnaire du budget de la défense), avec des dérives de coûts, et des quantités plus réduites que prévues (des données souvent dans l'ordre de bien des programmes).
Bref, l'opex a une conséquence accélératrice des carences capacitaires. Mais aussi d'un désarmement structurel : car le matériel remplaçant arrivera en quantité moindres. Et même s'il aura des capacités plus importantes (exemple Puma contre Caïman), il sera plus cher en maintenance, parfois plus long à maintenir, et surtout, il y en a beaucoup moins en parc. Sans compter que le minarm est désormais invité à régler lui-même la totalité des surcoûts budgétaires.
Il y a quelques années, on se moquait des Britanniques dont la défense a été étrillée par les engagements simultanés en Irak et en Afghanistan, et qui depuis, enquillent les renoncements capacitaires.
Prenons garde, néanmoins, de ne pas être les Britanniques de demain : même avec les injections réelles d'euros des dernières années, les chantiers de modernisations de capacités sont loin d'avoir été réalisés, voire même budgétés.
D'autant que la prochaine fois, les opérations ne seront sans doute pas menées contre des djihadistes peu équipés. Il reste encore beaucoup de charbon à lancer dans la chaudière budgétaire, et pas sûr que cette réalité passionne vraiment les contribuables, et encore moins les électeurs de 2022.

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