mardi 22 décembre 2009

Les renforts (suite)

Quand on fait des fuites et des coups de sonde, en Allemagne, on voit les choses en grand. J'en prends pour preuve celles d'un haut responsable militaire allemand qui évoquait, ces jours-ci, le départ de rien de moins que 3.500 militaires de la brigade Franco-allemande (BFA).
La BFA, FBI...
Un beau symbole, certes, mais un peu tardif, et peu crédible. Car si on comprend bien, le hiérarque voyait une contribution de 2.000 Allemands et 1.500 Français, ce qui témoigne d'une forte méconaissance des dernières réticences de l'opinion publique française, et des modes de fonctionnement de la préparation à l'Afghanistan, chez nous. Car l'objectif de ce surge est bien de déboucher dès le premier semestre 2010.
Dans ce beau tableau confectionné outre-Rhin, l'armée de Terre passerait alors à 4.500 militaires en Afghanistan, ce qui voudrait dire qu'il faudrait, en croisière, un réservoir de 27.000 soldats. Rien que pour l'Afghanistan : c'est tout bonnement impossible. Sans compter que le coût (financier, humain et en MCO pour les matériels) du théâtre afghan est autrement plus fort qu'au... Kosovo, dirons-nous, pour ne choquer personne.
L'équation qui consiste à dire "nous avons épargné tant de fantassins au Kosovo, redéployons-les en Afghanistan" est donc totalement fausse, car les tempo de préparation sont totalement différents. Et ce ne sont pas les mêmes capacités qu'on envoie dans l'un, et l'autre.
Sans compter que les Allemands souhaitant déployer la BFA avaient donc dans l'idée de déployer des Français en RC-N. Donc, de mettre à bas nos efforts de rationnalisation de notre dispositif terrestre. FBI, fausse bonne idée, comme dirait l'autre.
Et pour deux OMLT de plus...
Plus raisonnable, même si cela développe moins d'effectifs : renforcer le volant d'OMLT. Là aussi, apparemment, avec des idées précises, mais cette fois-ci, de ce côté-ci du Rhin. Les blindés disent depuis longtemps leur capacité à se déployer sans leurs Leclerc, construire une OMLT blindée aurait donc du sens. Cela ferait donc une septième OMLT, et mettre sur pied une 8e ne poserait pas des problèmes insurmontables, même s'il faudrait sans doute rationnaliser les façons dont ces unités sont générées. Mais en arrivant avec deux OMLT à Londres, alors que personne ne veut vraiment exposer ses unités en première ligne, c'est incontestablement un symbole fort (les Belges n'ont annoncé qu'une OMLT). Que nous ne reculons pas, et que nous souhaitons afghaniser.
Comme nous l'avons déjà écrit il y a presque un mois, un renfort de POMLT (gendarmes) n'est pas non plus insurmontable, mais pose la question de leur financement (rien n'a été réglé, pour l'instant, des 20 MEUR) et de l'emploi des gendarmes mobiles sur le territoire national. Une force qui est elle-même restructurée, comme l'armée de Terre.
Les forces spéciales, évidemment...
A deux ou trois reprises (Bucarest, Strasbourg), ce joker figurait dans la manche présidentielle. Alors que les demandes sont pressantes, tout autour de nous, nos forces spéciales sont l'atout maître pour calmer tout le monde (1). Cela leur permettra, par ailleurs, de maintenir un contact nécessaire avec un terrain complexe, et avec leurs homologues de l'OTAN. Comme pour les minidrones, la France était le dernier pays de l'ISAF à ne pas déployer cette précieuse capacité.
Reste, évidemment, à trouver les missions idoines, qui ne soit ni de l'infanterie légère, ni du mentoring, deux missions déjà assurées par d'autres.

(1) Jacques Chirac utilisa la mise en place du TG Ares dans le même but, en 2003. Coïncidence, son chef d'état-major particulier était l'actuel chef d'état-major des armées (CEMA).