samedi 11 janvier 2020

"Trop cher"

Les industriels n'ont pas forcément été habitués à entendre cette phrase, mais celui qui est chargé de
la maîtrise du projet Eurodrone l'entend désormais régulièrement. Florence Parly l'a dit ce matin sur France Inter, dans les dernières secondes de son ITW à la radio, l'Eurodrone est "trop cher".
Une telle question du présentateur, qui arrive à la fin d'un entretien géostratégique ne doit évidemment rien au hasard. Et on voit mal comment, en fait, quelqu'un pourrait sauver l'Eurodrone, le trop cher de ce matin tenant en quelque sorte d'épitaphe à cet éléphant blanc mort-né.
L'enterrement de première classe pourrait arriver avec le résultat des prochaines élections allemandes qui ne devraient pas célébrer un coup de fouet des dépenses militaires. L'Eurodrone irait donc rejoindre au cimetière des projets de drones Airbus, le Global Hawk germanisé, le Talarion, le Tannan. Tout cela en quelques années seulement, et après avoir disposé de financements publics dans certains cas.
Et alors que la division Defense and Space, qui porte le projet, n'a pas la grande forme : son patron, Dirk Hokke n'a pas annoncé de bonnes nouvelles aux salariés, juste avant Noël.
Airbus devait remettre en début d'année un nouveau devis au minarm, mais on peut estimer que la déclaration de la minarm clôt le sujet.
Pour la France, c'est un premier désastre. L'armée de l'air aura le successeur de l'actuel Reaper en retard : cette succession a déjà deux, peut-être trois ans de décalage, et vu le cadencement sur lequel la flotte du moment est utilisé, pas de risque qu'elle puisse durer au-delà des durées promises.
Industriellement, il y a avait sans doute du travail en vue pour les Français dans l'Eurdrone, mais rien n'était, en fait, réellement sûr. Le seul point qui l'était concernait la propulsion, et Safran a connu, dans ce domaine, des résultats parfois difficiles ces dernières années. Allié à un Allemand, cela n'aurait sans doute pas été facile.
Tout n'est pas perdu, néanmoins. Le malheur des uns faisant souvent le bonheur des autres, GAASI peut encore plus valoriser sa carte de l'EuroGardian, avec une chaîne mission américaine, partiellement ou totalement européenne. Le vecteur est sain, endurant (plus que ne l'aurait été l'Eurodrone...) et GAASI a donc dégaîné l'arme fatale : des composants européens peuvent venir se greffer sur son vecteur.
Si les équipementiers Français peuvent y jouer leur carte, il faudra le faire évidemment en coûts et en temps (pas refaire l'Eurodrone en quelque sorte). Avantage aussi du système Reaper, les armes sont déjà qualifiées, mais il est aussi possible d'y ajouter, là aussi, du made in France.
L'addition devrait revenir à 50% de celle de l'Eurdrone, avec des performances supérieures et avec la promesses d'une interopérabilité avec d'autres forces aériennes alliées qui ont déjà choisi cette version (mais aussi entre l'armée de l'air et la marine, fascinée par les MALE).
Ce qui aura l'avantage de simplifier le MCO et la déployabilité du système en opérations extérieures car on l'oublie souvent : de tels engins sont achetés pour servir à la guerre, pas pour faire des ronds au-dessus de l'Allemagne.

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