Je le confesse, je ne serais pas allé vers ce genre de livre si l'éditeur, qui croit à la force du récit, ne
l'avait pas poussé jusqu'à ma table de chevet. François de St Exupery se trompe rarement, et il ne s'est pas trompé avec "La Naissance d'un pilote", qui succède à "La guerre vue du ciel", de Marc Sheffler.
Qui, on l'a compris, le précède dans le temps.
Si j'étais un aspirant-aiglon d'aujourd'hui, j'y aurais trouvé tous les arguments et éléments de motivation pour un cursus de pilote de chasse -mais pas forcément pour un cursus long- : certains éléments de décor changent, mais le reste, pas beaucoup. Le Tuc' est déjà reparti, l'Alpha Jet de Tours va bientôt partir, si, à la fin, FOMEDEC est bien lancé avant la fin de l'année (1).
Ce livre est celui d'une transformation, qui dépasse, celle, en clin d'oeil, du titre.
Comment un cursus peut faire de post-ados des pilotes de combat ? Ce livre n'en explore qu'un, celui de la voie royale, de l'école de l'Air (2).
Le livre commence en fait plus tôt, à l'école des Pupilles de l'air de Grenoble, puis enquille l'école de l'Air, l'école de l'aviation de chasse (EAC) et la transformation opérationnelle (ETO).
Ce long parcours est parsemé d'anecdotes, certaines truculentes et potaches (qu'on aurait aimé avec plus de détails), d'autres nettement moins drôles.
On croise au fil des pages le jeune Bouba, futur pilote de Mirage 2000N, futur JTAC, puis futur pilote de Rafale (3).
Tous les dialogues ont été reconstitués, et le livre se concentre plutôt -et logiquement- sur l'activité aérienne, la plus facile à raviver : le carnet de vol y aide, et un pilote se souvient plus de ses heures dans le ciel que dans l'amphi à potasser les matières plus académiques. C'est aussi fait pour ça, les remarques cinglantes de l'instructeur resteront tout une vie dans la tête, les mains et les pieds qui les ont provoquées.
Un livre immersif dans ce qu'était l'ambiance de cette promo, une bonne idée donc (4), dans la lignée de "L'école des Aigles" de Jean-Michel Charlier (avec des bulles), qui aurait fait un bon titre pour ce livre-ci.
(1) comme l'a redemandé le CEMAA face aux députés.
(2) en 2016, et contrairement à une idée répandue, il reste possible de devenir pilote avec un simple bac comme officier sous contrat -c'est la première source de navigants-, ou via le cursus interne des sous-officiers. Le seul travers du livre, c'est de montrer un cursus long, qui pourrait décourager un lecteur trop pressé, alors que toutes les voies mènent au Rafale : d'abord une question de motivation. Une idée de livre, donc, pour ceux qui s'en sentent le courage (cela peut-être aussi long en gestation que la formation d'un pilote de chasse...)
(3) Le capitaine Emmanuel "Bouba" Moriuser s'est tué dans son Rafale en 2007.
(4) je ne suis peut-être pas suffisamment curieux, mais il me semble que des trois armées, c'est le premier livre que je lis, entièrement consacré à la formation initiale d'un officier.
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