La Provence rapporte ce matin un bizutage hors normes, qui s'est tenu en mars 2019 sur le champ de tir
de Diane (Haute-Corse) : "un pilote a été ligoté à une cible sous le tir des canons" écrit le journal qui ajoute qu'une plainte a été déposée par l'intéressé.Selon nos sources, le pilote appartenait à l'époque à l'escadron 2/5 Ile-de-France (1) qui tient ses traditions dans la France Libre. Donc pas dans le creuset culturel développé à Diane ce jour-là. Ce recours ne fait pas non partie des manuels d'entraînement à la survie et le bizutage est officiellement proscrit dans les armées, notamment dans les écoles, où il a régulièrement créé de gros dégâts.
L'officier, un direct en début de carrière, n'a rapporté les faits que bien plus tard. Depuis, il a été réorienté dans le transport sur avion léger.
L'affaire tombe mal pour l'état-major de l'armée de l'air qui faisait déjà face, en début d'année, à d'autres accusations issues de militaires et anciens militaires d'escadrons de chasse de la base aérienne 133 (deux femmes et quatre hommes, dont deux navigants, trois personnels de renseignement, un mécano). Déjà à l'époque, les plaignants évoquaient des problèmes de bizutage et de harcèlement moral, voire sexuel.
Plusieurs affaires de crucifixion emblématique ont déjà généré des punitions, dans les années 2000 en France, puis en opex, dans la décennie suivante. On n'a pas d'éléments sur les origines de cette pratique nauséabonde.
L'armée de l'air, qui a communiqué sous pression de La Provence, reconnaît la culpabilité des auteurs. Elle dit n'avoir été saisie du problème qu'en "début d'année 2021" et dément presque préventivement avoir été inactive dans cette affaire, la difficulté provenant d'un "compte-rendu tardif" de l'intéressé. Un retard que l'AAE relie à sa volonté de changement de poste et de spécialité.
Suite à une enquête de commandement qui a "pris du temps", elle assure avoir pris des sanctions présentées comme "lourdes", à bases de jour d'arrêt. Une sanction qui ferait des dégâts dans les dossiers des intéressés, présentés majoritairement comme des "officiers supérieurs", en tout cas "tous des officiers en responsabilité qui ont organisé ou participé" à cette "mise en scène inadmissible". Et pas très en rapport avec les prérequis et à l'équilibre demandé à des pilotes de chasse.
L'armée de l'air estime que son pilote n'a "pas été mis en danger", à plus de 1000 mètres de la zone visée par des chasseurs. La même explique son silence sur le sujet par le fait que les périodes de recours des sanctions ne sont toujours pas terminées. Mais il est assez peu problable que ce délai passé, on n'aurait pas entendu parler de cette affaire qui prend, à la une de La Provence, une nouvelle dimension, obligeant l'armée de l'air à communiquer en crise.
Elle place les militaires à la rubrique fait divers une nouvelle fois en quelques jours, de quoi énerver encore plus la grande majorité de ceux qui s'épuisent déjà au service de leurs pays, dans un climat interne plus que jamais tendu. Et à la veille de renouvellement des grands chefs : sans nul doute, les faits divers des derniers jours auront un impact sur ces nominations.
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(1) l'escadron dispose des derniers Mirage 2000C et 2000B de l'armée de l'air. Il participe à la défense du ciel français, et déploie actuellement deux appareils à Barkhane. Les campagnes de tir visent précisément à s'entraîner aux deux missions, qui appellent une précision sans faille. La mobilisation des 2000C à Barkhane s'explique notamment par leur capacité quadribombe et tir canon que n'ont pas les Mirage 2000D.