Après avoir accepté une forme de transparence sur son activité, l'état-major revient à une ligne
minimaliste. Les blessés de guerre étaient mis en valeur, furtivement, cette semaine, avec un match de bienfaisance, mais le lendemain même, aucun chiffre n'était disponible, sur le nombre de blessés, physiques comme moraux, générés par les opérations au Sahel ou en RCA. Pas opportun explique-t-on. Les blessés sont visibles, apparemment, quand ils servent la com, ensuite...
Pour les consommations des bombes envoyées à Daech, c'est pareil. Tout au plus, chaque semaine, l'EMA tient le compte du nombre de frappes. Deux cette semaine, un peu plus de 800 depuis le début de Chammal. Mais pas de moyen de pouvoir lire la réalité de cette activité. Une consoeure qui a interrogé l'EMA jeudi sur la consommation de bombes n'a eu aucune réponse, comme les questions qui avaient précédé la sienne.
Il suffit de traverser le channel pour pouvoir lire le détail des pélots envoyés par les Reaper, Typhoon et Tornado. La com britannique nous apprend même que le cap des 1000 frappes vient d'être franchi, et avec une sens du détail rare qui donnerait la jaunisse à un communicant français, le site du MoD, donne même la liste, au quotidien, des frappes et des aéronefs et munitions utilisées. C'est pour le soutex du Typhoon, sans doute. Pas seulement, le MoD reconnaît explicitement que le combat contre Daech, c'est aussi de produire ces chiffres.
Exemple, pour la journée du 3 septembre (avertissement : âme com sensibles, prenez un cachet avant de lire ces lignes) : "On Saturday 3 September, a Reaper kept close watch on a Daesh vehicle check-point in north-western Iraq, in the Tall Afar region, which was being used by the terrorists to harass local civilian traffic. The Reaper’s crew waited patiently until there were no civilian vehicles in the area, then destroyed the check-point with a direct hit from a Hellfire.
The following day, Typhoons patrolled over western Iraq and engaged a group of terrorists who had been spotted several miles north of Ramadi. Although they attempted to seek cover beneath some trees, the extremists were struck accurately by a Paveway IV".
Mais c'est vrai qu'en Grande-Bretagne, la Royal Air Force est le rempart historique contre pas mal de maux, et qu'un britannique n'accepterait pas de ne pas connaître ce que font ses aviateurs. Et le contribuable aime savoir où file ses livres sterling.
En France, l'état-major ne livre aucun détail sur ce qui est pourtant le vrai combat contre Daech (les FS ne sont pas en reste non plus). On sait que le compte de Scalp-EG dépasse maintenant allègrement la cinquantaine en une demi-douzaine de frappes, le reste des 800 et quelques frappes, c'est donc de la bonne vieille bombe, avec une tête de guidage américaine (GBU-12, GBU-49) ou française de chez nous (AASM), et parfois, quelques 30 mm dans le lot.
Les commandes de corps de bombes (dédicace à HC) à répétition, ces deux dernières années, mais aussi de ces têtes de guidage, montrent bien que l'armée de l'air (et la marine quand le PACDG est de service) envoient du bois.
Comme pour le confirmer, le ministre de la défense a fait récemment une chaude réclame de l'AASM, en visitant une des usines de son fabriquant... et en annonçant de fortes commandes (dont il n'a pas souhaité détailler le montant), qui permettront de créer localement près de 150 postes (pas une paille donc) pour fabriquer ces kits et leur version allégée, AASM évolution. Car l'AASM, c'est utile, mais c'est aussi coûteux, et l'industriel a été sensiblisé par ses clients (dont le Français) à une réduction de la facture (c'est ça l'évolution).
La facture, oui, car il y en a toujours une, humaine, matérielle, budgétaire. Trois bonnes raisons pour, de temps en temps, prendre quand même un peu au sérieux les questions des journalistes. Il est en effet difficile de réclamer des moyens supplémentaires, quand on accepte aussi peu de donner des explications sur la consommation de ceux qui servent déjà.