samedi 16 janvier 2016

Après Paris, Bamako, Ouaga

Pour rester dans la course média, financière, et RH, il faut faire parler de soi. Ce qui est vrai pour les
autres est vrai pour les terroristes aussi, donc AQMI, assez éclipsée par les actions bien plus massives d'EI, au Proche/Moyen-Orient, mais aussi en Libye, doit rester dans le coup, dans la zone Barkhane.
Après des attentats projetés ou avortés au Niger, au Mali, c'est dans le plus inattendu des cinq pays que le groupe a frappé, hier.
Une première attaque a d'abord eu lieu dans la zone frontalière, sans qu'elle ait été reliée, encore, à celle intervenue dans la capitale.
Comma à Bamako en novembre, c'est un hôtel bourré de ressortissants qui a été ciblé (le choix n'a pas dû être très difficile).
Comme à Bamako, mais aussi comme à Paris (pas d'ethnocentrisme) en novembre, les assaillants (4 ou 5, dont peut-être des femmes) ont eu une liberté de manoeuvre assez longue, avant que les forces spéciales françaises, qui campent depuis 2010 au Burkina-Faso, ne fassent changer le script, jusqu'à l'issue de ce matin.
Les détails s'affineront dans la journée, mais le bilan provisoire fait état d'au moins 22 morts, issus de presque autant de nationalités.
A ce stade, aucun militaire français ne semble avoir été touché dans les combats qui ont nécessaires pour reprendre l'hôtel aux assaillants.
Contrairement à ce qui s'était passé en novembre, aucun renfort ne semble avoir été demandé en France. On peut l'interpréter de différentes manières : l'état de la menace en France même suffit à occuper tout son mande dans les groupes spécialisés. On le voit aux annonces de l'Intérieur, qui prévoient même de gonfler le périmètres du GIGN (avec les 6 PI2G) et du RAID (avec de nouvelles antennes s'ajoutant aux 7 actuelles créées en mars, peut-être issues des BRI de la DCPJ).
Il était en plus bien plus simple de laisser oeuvrer la TF Sabre, dont la base est à Ouaga (1). On a presque fini par l'oublier, le principal conseiller du président est un ancien GCOS, il connaît donc parfaitement les atouts de ces commandos, dont le recours est monté en flèche depuis l'arrivée du général Puga à l'Elysée.
 Depuis sa création en 1992, le bilan des unités du COS en matière de contre-terrorisme et libération d'otages (CTLO) est globalement... incroyable (2) et sans comparaison dans le monde.  Ce bilan s'est accentué ces dix dernières années, traduisant le niveau franchi par les unités, mais aussi la manière d'utiliser toutes les composantes, comme on le sait, la vraie force des forces spéciales.
Ce bilan écrasant n'est pas forcément toujours bien reconnu, même s'il est globalement... jalousé. Dans les heures qui viennent, une reconnaissance un peu plus officielle que le laconique message de la permanence de l'Elysée, ce matin, ne serait peut-être pas de trop...
 
(1) la réalité opérationnelle fait souvent que l'essentiel de la TF Sabre n'est pas présente dans cette base arrière, comme l'affaire de Bamako l'avait bien illustré : l'objet de cette unité n'est pas d'attendre au camp les prises d'otages en ville...
(2) sur plusieurs dizaines d'opérations menées directement par les unités, seules deux opérations de vive force n'ont pas permis de sauver tous les otages (Tanit 2009 et Delory/De Léocour 2011), dans des contextes très particuliers. 

Mes tweets d'actu sur @Defense137. 
Mes derniers livres : Le RAID, 30 ans d'opérations (Ed Pierre de Taillac), L'armée au féminin, préface de Jean-Yves Le Drian (Ed Pierre de Taillac) et Commandos du Ciel, préface du général André Lanata (Editions JPO).