lundi 7 septembre 2009

Embraer cherche à capitaliser dans le militaire

Embraer a réussi à plus que percer sur le marché civil : c'est même une réussite extraordinaire. L'avionneur veut faire pareil sur le marché militaire, avec un avion qui puisse revendiquer le succès international que n'ont pas totalement connu le Xingu ou le Tucano.
L'avionneur brésilien a montré cependant, à plusieurs reprises, qu'il savait sentir le marché avant l'heure, et parfois avant certains grands. Il a réussi à vendre son ERJ 135/145 à la Belgique (version VIP, utilisé notamment par le Secrétaire général de l'OTAN), et à la Grèce (version Awacs). Et son Super Tucano serait peut-être bien plus utile que bien des jets, en Afghanistan : il peut, éventuellement, jouer plus que les trouble-fêtes dans l'appel d'offres de l'USAF, pour une centaine de machines.
Avec le KC-390, c'est un presque saut dans l'inconnu. Le fait que Dassault Aviation soit intégré -on ignore encore précisément pour quoi faire, et si cela se traduit par un investissement financier- dans le développement n'est donc pas un total hasard. Ses méthodes de développement sont mondialement reconnues, et elles ont généré des résultats spectaculaires sur la conception du F7X, sans passer par le traditionnel prototype. C'est, entre autres, cette capacité à s'immerger dans le virtuel en gardant les pieds sur terre qui va vraisemblablement être mise à profit par Embraer (1).
Les Français ont des cartes à jouer
Si l'on considère le programme, on peut même dire qu'à ce stade, l'industrie aéronautique française a quelques cartes à jouer. Sur les moteurs, on peut imaginer que CFM (Safran/GE) peut concourir avec des chances raisonnables de l'emporter. Les Safran et Thales ayant par ailleurs quelques briques à offrir, en matière d'électronique embarquée : radar, planche de bord, commandes de vol, optronique, systèmes d'autoprotection... Safran, encore, peut se placer sur les atterrisseurs (Messier-Dowty), un système essentiel pour un ATT et sur lequel il dispose de recherches fraîches, avec l'A400M. Une partie des investissements effectués pour l'A400M pourront ainsi, en quelque sorte, être amortis sur un autre avion.
Et d'autant plus que ces groupes français ont déjà noué des accords de partenariat avec des sociétés locales, pour compenser la vente du Rafale. Thales a même racheté une société d'électronique a qui elle a déjà confié du travail...
Le pari du Brésilien est osé : aller chasser sur le terres du C-130, dont le système d'armes -la soute- n'a pas évolué d'un iota, malgré le rallongement du cargo, sans incidence sur la largeur.
Le préalable était sans doute la crédibilisation rapide du programme : c'est ce qu'apporte la France, dans un marché à trois bandes, centré sur le Rafale mais comportant vraisemblablement, en arrière-plan direct, l'achat de KC-390.
Ce qui sortait d'emblée la Suède, qui n'a pas de besoin de ce type. Les Etats-Unis avaient déjà acheté du C-27J et du C-130J, donc n'avaient plus de besoins. La conclusion s'imposait.

(1) pour mémoire, rappelons que les derniers "gros" avions conçus par Dassault furent le Mercure (civil) et l'Atlantique 2 (patrouille maritime).