mardi 7 juillet 2009

Les trigrammes de la colère





Le moral est toujours une donnée difficile à mesurer scientifiquement, ce qui n'est évidemment pas le cas de la mauvaise humeur et de l'inquiétude. Alors que l'armée de l'Air va maigrir de 24% en quelques années, engageant un effort sans précédent, les aviateurs avaient déjà quelques bonnes raisons. Et en trouvent désormais une de plus avec les nouveaux trigrammes référençant leur avions.
Car si la réforme était passée dans la quasi-indifférence, les nouvelles peintures allument une traînée de poudre quand le compte à rebours du pinceau arrive. Les stratagèmes les plus divers sont d'ailleurs parfois imaginés, pour escamoter l'avion lui-même, le pot de peinture, voire les ordres. De là à imaginer des peintures sympathiques...
Car désormais, les aéronefs ne sont plus immatriculés sur les indicatifs des anciennes escadres, mais sur celui du numéro de la base aérienne. Or, pour l'aviateur, qu'il soit PN ou mécanicien, la tradition d'escadre est notoirement plus forte.
On avait déjà constaté des remarques désabusées à la mise en place des ESTA (escadrons de soutien aéronautique), "garages aéronautiques" fournissant du potentiel à une base aérienne entière, là où auparavant, chaque escadron avait son propre groupe de mécaniciens. Les anciens prophétisaient une perte de référence, de culture, et au final, de productivité.
Les évolutions du taux de disponibilité sont là comme élément de réponse. Une unité qui garde sa "piste", comme le 3.61 "Poitou" aligne la plus forte disponibilité des ATT l'armée de l'Air.
Evidemment, on trouvera toujours quelqu'un pour gloser sur les aviateurs. Mais que dirait-on dans l'armée de Terre si le blindé canon AUF1 baptisé Bouake devenait le matricule "65-230". Ou si le Leclerc "Cercottes" était réduit à son immatriculation, 60740046 ? Voire, si le Charles-de-Gaulle était réduit à un numéro de coque ?
On le voit bien, la tradition, maniée avec juste raison, est avant tout facteur de cohésion...

Nos photos : Quelques clichés illustrant le poids des traditions dans la chasse. Avec d'abord le Mirage 2000C du "Picardie", escadron dissous, et le Mirage F1CT du "Neu-Neu", mis en sommeil avec l'espoir de renaître sur Rafale, à Mont-de-Marsan. Le poids des susceptibilités étant ce qu'il est, le Neu-Neu n'est même pas officiellement en sommeil : son drapeau a été transféré, avec 13 Mirage F1, à Reims. Pour ceux qui ne connaissent pas, ces avions sont des pièces rares, peints pour les grandes occasions, en général par les mécaniciens.
Plus bas, un Mirage F1CR avec sa nouvelle immatriculation, en -112, numéro de la base de Reims. Pour finir, un Rafale en -113. Le mobile raclant sa dérive est un F-16 belge...
(crédit JMT).